Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 4.djvu/160

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cadeaux ne peuvent la pousser à souiller le lit nuptial, alors, tu pourras dire qu’elle est fidèle."

« Par de telles paroles et d’autres semblables, la magicienne poursuivit jusqu’à ce qu’elle eût éveillé eu moi le désir de mettre à l’épreuve la fidélité de ma femme. "Supposons — lui dis-je alors — qu’elle ne soit pas ce que je pense ; comment pourrai-je savoir d’une manière certaine si elle mérite le blâme ou l’éloge ? "

« Mélisse répondit : "Je te donnerai une coupe qui possède une rare et étrange vertu. Morgane la fit autrefois, afin de prouver à son frère la faute de Ginevra. Celui dont la femme est sage peut y boire ; mais celui dont la femme est une putain ne le peut, car le vin, au moment où il croit le porter à sa bouche, s’échappe de la coupe, et se répand sur sa poitrine.

« Avant de partir tu en feras l’épreuve, et je crois que cette fois tu pourras boire d’un trait. Je pense en effet que ta femme est encore innocente, et tu le verras bien. Mais si, à ton retour, tu tentes une nouvelle épreuve, je ne réponds pas que ta poitrine ne soit inondée. En tout cas, si tu ne la mouilles pas, si tu bois sans a obstacle, tu seras le plus fortuné des maris."

« J’acceptai la proposition. Mélisse me donna la coupe ; je fis l’expérience en question et tout alla bien : je vis que ma chère femme était jusque-là chaste et bonne. Mélisse me dit : "Maintenant, laisse-la pendant quelque temps. Reste loin d’elle pendant un mois ou deux, puis reviens, et