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De Bordeaux, Burie et La Boétie remontèrent le cours de la Garonne jusqu’à Langon. En passant à Cadillac, ils mandèrent les officiers de M. de Candalle avec les jurats de Cadillac et firent déposer toutes les armes à la maison commune, ce qui eut lieu aussi à Langon et à Saint-Macaire. De Langon, Burie gagna Bazas. C’est là qu’il apprit la prise du couvent des Jacobins par les huguenots et que le ministre d’Agen, celui de Villeneuve et quelques gentilshommes réformés vinrent lui faire soumission et promettre fidélité au roi. Il en fut de même, suivant de Bèze, de commissaires envoyés de Nérac.

Dès cette première étape, Burie écrivit au roi pour lui dire comment les choses s’étaient passées. C’est de sa lettre, jusqu’à maintenant inédite, que nous tirons les renseignements qui précèdent. Nous y trouvons encore un passage fiatteur pour le conseiller qui l’accompagnait. « J’ay aussy receu, Sire, disait Burie, la lettre qu’il vous a pleu escrire à vostre cour de parlement, à laquelle je la baillay, premier que partir. Et ay icy avec moy le conseiller qu’elle m’a baillé, qui se nomme Monsieur de La Boytye, lequel est fort docte et homme de bien[1]. » Comme on le voit, le lieutenant général savait apprécier les qualités morales de celui qui devait le seconder dans sa tâche.

Burie se proposait d’aller de Bazas à Monségur et à La Réole ; sans doute ce projet fut mis à exécution. Les deux compagnons gagnèrent assurément Marmande et ensuite Agen, où ils firent leur entrée le 3 octobre, escortés du prévôt général de Guyenne, Des Fourneaux. Là, nous l’avons déjà dit, la situation était fort tendue. Dès son arrivée, Burie remet aux consuls les lettres dont Charles IX l’avait muni au préalable. Elles étaient pressantes et contribuèrent à faciliter l’accomplissement de cette entreprise[2]. Le roi disait : « Nous vous prions et néantmoingz ordonnons que vous ayez à assister au dict sieur de Burye, afin de luy ayder et donner les moyens de savoir les noms de ceulx que vous avez entendeu en estre auteurs et motifs, afin de les faire prendre et que justice exemplaire en soyt faicte, telle que la grandeur du cas le requiert : à quoy vous ne ferez faulte, car tel est nostre bon plaisir. »

  1. Bibliothèque Nationale, Fonds français, n° 15, 875, f° 190.
  2. Francisque Habasque, Un magistral au XVIe siècle, Estienne de La Boétie (Discours de rentrée prononcé à l’audience solennelle de la Cour d’Agen, le 3 novembre 1876), p. 50.