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Page:La Bruyère - Les Caractères, t. 1, éd. Destailleur, 1854.djvu/10

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Avertissement.

constitué, qui représente les lettres elles-mêmes. J’ai nommé l’Académie française. C’est à elle qu’il appartient de conserver nos monuments littéraires les plus précieux ; c’est à elle que revient le droit et l’obligation de nous rendre dans toute leur pureté primitive les chefs-d’œuvre de notre langue, et, sinon d’exécuter, au moins de diriger, de surveiller leur reproduction. Elle s’honore déjà en récompensant les éloges qui font apprécier les grands écrivains : rien ne peut mieux les faire apprécier que de bonnes éditions. Qu’elle propose des concours, qu’elle nomme des commissions, qu’elle encourage les hommes qui se vouent à ces travaux pénibles et si souvent ingrats : elle aura rempli sa mission naturelle, bien mérité des lettres et de la patrie.

Sans attendre une telle assistance, nous avons tâché de faire pour La Bruyère ce que nous voudrions qui fut fait pour tous les classiques. Nous lui offrons le tribut de nos soins, de nos études, en retour du plaisir qu’il nous a si souvent procuré.

Chaque fois que nous avons relu les Caractères, nous avons été frappé de beautés nouvelles. Il y en a tant dans ce livre, et de tous les genres, que, malgré l’attention la plus soutenue, il en échappe toujours quelques unes. Elles sont d’ailleurs souvent voilées et comme dissimulées par un artifice de style, qui leur fait produire plus d’effet lorsqu’on les découvre. Il faut donc un examen très approfondi pour bien connoître La Bruyère et pour le goûter. « Personne presque, dit-il lui-même, par la disposition de son esprit, de son cœur et de sa fortune, n’est