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croisade contre les albigeois.

car les Toulousains perdirent W. P. de Mauros[1], [7280] et Loup de Foix[2] fut blessé et bien d’autres barons, dans le champ de Montoulieu, dans le verger périlleux où chaque jour renaissent le blanc et le rouge[3] ; mais le sang, les cervelles, la chair, les membres[4], en sont les fleurs et les feuilles et les fruits douloureux, [7285] dont maints beaux yeux sont restés en pleurs.

Le comte s’en retourna triste, dépité, furieux. De colère il disait : « Jésus-Christ glorieux, seigneur, où est mon étoile, d’ordinaire si favorable, si précieuse, si brillante et si propice, [7290] que par mer et par terre s’en répandait le renom ? Jamais je ne croyais me voir réduit à ce point de misère (?) que ni armes, ni saint, ni prière, ne me valussent rien ! Et puisque la sainte Église ne défend ni moi ni elle-même, c’est sa valeur, c’est son précieux nom qui y perdent. [7295] Cher Seigneur, je vous en prie, plaintif et inquiet, ou faites-moi mourir, ou donnez-moi la grâce de vaincre la ville et de m’en rendre maître[5] ! » Là-dessus le comte rentre, dépité et courroucé, tandis que les barons [de Toulouse] s’en reviennent joyeux, [7300] se disant l’un à l’autre :

  1. La forme actuelle serait Mauroux. Il y a des Mauroux dans la Dordogne, le Gers, le Lot et le Tarn-et-Garonne.
  2. Fils, probablement illégitime, du comte de Foix ; il figure dans les actes jusqu’en 1243 (Vaissète, III, 572 b).
  3. C’est de nouveau l’idée exprimée plus haut v. 7145 et suiv.
  4. Ici brazos est non plus, comme au v. 7255, une pièce ou un accessoire de l’armure, mais une partie du corps ; c’est proprement la partie charnue d’un membre, non pas seulement des fesses, comme j’ai interprété, en un sens trop restreint, au vocabulaire.
  5. G. de Puylaurens (Bouquet, XIX, 213 b) : « ..... unde, ut dicebatur, orabat Dominum ut sibi mortis remedio daret pacem. »