Page:La Curne - Dictionnaire historique - 1875 - Tome 01.djvu/39

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
AB — 15 — AB


Bien guile la Dame et abete

Son Seignor qui tant s’en espert.

Fabl. MS. de S. G. fol. 123, R° col. 1.

Dans le sens d’animer, exciter, ce mot signifie proprement opposer deux bêtes, deux animaux l’un à l’autre. On disoit au figuré : " Pour ce que vous abbetastes et procurastes discorde entre notre Seigneur le Roy et la Reine et les altres du Réalme. " (Du Cange, Gloss. Lat. citat. au mot Abbetator.)

De là, la signification d’abeter, pour attaquer de front, faire tête. " Il leur tourna l’écu.... vers le visage aussi fierement que fait le porc-sangler aux chiens quant ils sont abetés. " (Percef. Vol. I, fol. 125, V°, col. 1.)

On a dit par extension s’abetter, pour s’aheurter, s’attacher sans démordre.

Trop est folz qui à eux s’abette.

Hist. des 3 Maries, en vers, MS. p. 330.

VARIANTES :

ABESTER. Les quinze Joyes du mariage, p. 202.

ABBETER. Du Cange, Gloss. Lat. au mot Abbetator.

ABETER. Fabl. MS. de S. G. fol. 384.

ABETTER. Hist. des Trois Maries, en vers, MS. p. 330. Abestir, verbe. Rendre bête, abrutir.

(Voy. ABESTER ci-dessus.)

.... plusieurs sont,

Quand femmes ont,

Mal s’en chevissent ;

Et grant mal font,

Quand se forfont,

Et s’abestissent :

Tant les chérissent,

Et obeissent,

Que de liberté le défont,

Blason des faulces amours, col. 259.

VARIANTES :

ABESTIR. Sag. de Charron, p. 132. - Crétin, p. 133.

ABESTIER. Froiss. Poës. MSS. p. 339, col. 1.

ABETIR, d’où le participe Abeti pour Hébété, dans Martin Franc

Abet, subst. masc. Espèce de sapin.

En latin abies. Il y a au pays de Foix, sur les monts Pyrénées, un ancien sapin qu’on appelle l’Abet coronat ; c’est-à-dire sapin couronné, en mémoire de ce qu’on tient qu’autrefois trois Rois dînèrent dessous. (Borel, Dict. au mot Sap. p. 405, et Ménage, Dict. étym.)

Abete, subst. fem. Instigation.

Du Cange l’explique en ce sens dans ce passage : " Ont faits que nostre Seigniour le Roy sans assent du Royaume ou deserte d’eux, lour ad doné par lour abete, moult diverses Seignouries, etc. " (Gloss. Lat. au mot Abettum, col. 38.) Ce mot, qu’on a fait venir du Saxon, ne seroit-il pas le même qu’Abet, ruse, ci-après sous ABETH, formé d’Abester ?


Abeth, subst. masc. Action d'attendre. Action de guetter. Ruse, friponnerie. Erreur, mécompte.

Proprement ce mot au premier sens signifie l'action de béer, d'attendre en béant, par extension, retard, délai.

Et puis me dit, por abet

Que je feisse sur ce buffet.

Fabl. MS. du R. n° 7615, T. I, fol. 120, R° col. 1.

Or entendez un petitet

N'i ferait mie grant abet .

Fabl. MS. du R. n° 7218, fol. 230, V° col. 1.

De là, pour l'action d'attendre en observant, l'action de guetter, on lit en ce sens :

Or soiez demain en Abé

As fenestres de cele tor.

Alex. et Arist. MS. de S. G. fol. 72, V° col. 3.

D'Abeter, duper, tromper, on a pu dire abet pour ruse, artifice, friponnerie. (Voy. ABESTER et ABETE ci-dessus.)

Si te va pendre à un gibet

Tu ne sez rien fors que d'abet

Fabl. MS. du R. n° 7218, fol. 215, R° col. 1.

C'est peut-être en ce sens que pour désigner tout ce qui peut servir à tendre des piéges aux animaux et à les prendre, on s'est servi de l'expression d'armes de maint abet.

De Venerie, i a oustill.

Le quenivet et le fuisill,

Et li tondres et li galet

Et moult arme de main abet.

Parten. de Blois, MS. de S. G. fol. 143, R° col. 1.

Enfin pour erreur, mécompte, comme dans ces vers :

.... estoit enchainte

La douce Vierge digne et sainte,

Desquiex troiz moiz dit sans abeth

Quant je parlay d'Elizabeth ;

Ainsi devoit la Vierge tendre

Pour enfanter six mois attendre.

Hist. des 3 Maries, en vers, MS. p. 82.

VARIANTES :

ABETH. Hist. des trois Maries, en vers, MS. p. 82.

ABÉ. Anc. Poës. Fr. MS. du Vat. n° 1490, fol. 148, R°.

ABET. Fabl. MS. du R. n° 7218, fol. 215, R° col. 1.

Abetere, adj. Sot, hébété.

Mouskes, parlant de Charles le Chauve, dit en ce sens :

D'une feme, ki fu gentius,

Avoit uns fil ki fu soutius ;

Loeys li Baubes ot non ;

Et facies k'il ot cest sornon ;

Pour cou k'il estoit baubetere ;

Mais il n'iert fos , ne abetere.

Ph. Mouskes, MS. p. 328.

VARIANTES :

ABETERE. Phil. Mouskes, p. 328.

ABETIERE. G. Guiart, MS. fol. 16, R°.


(1) trompe. — (2) comme en attendant. — (3) retard, délai. — (4) quenivet, canivet, diminutif de canif. — (5) amadou. — (6) pierre à fusil, caillou. — (7) subtil, fin. — (8) bègue. — (9) eut ce surnom. — (10) balbutiant. — (11) n’étoit fol.