Page:La Curne - Dictionnaire historique - 1875 - Tome 01.djvu/78

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
AC — 54 — AC


- Voy. Du Cange, Gloss. Lat. au mot Accolligere, qu'il explique par Associare.)

L'association est une espèce d'engagement. De là le verbe s'accueillir, pour s'engager en s'associant à quelqu'un. " Se alloua ou accueilli a un Maistre du mestier. " (D. Carp. suppl. Gloss. de Du Cange, au mot Accolligere.) " Comme le suppliant se feust alloué et accueilli avec... Hermen Vandouborne Maistre de la nef Marie Quenech... pour le servir... par la mer. " (Id. ibid. - Voy. ACCUEILLAGE ci-après.)

Pour s'engager en général, comme dans ce vers :

A vos servir tout m'acuel.

Symon d'Autie, Anc. Poët. fr. MSS. avant 1300, T. III, p. 1231.

On dit encore dans quelques Provinces, accueillir un domestique, pour l'engager à son service.

Accueillir conserve encore la signification figurée de faire accueil ; recueillir, recevoir humainement, avec bonté. On trouve au même sens Escueillir dans ces vers, où le Poëte dit, en parlant d'un amant indiscret :

... chil ki garde ne prent A cose k'il die ; Ains aime si durement Ke tot si en oublie ; Bien aperchoit ki entent K'ill ne proie fors ensi Com amors l'a escueilli, N'en a baerie Fors à çou c'on ait oit son talent.

Anc. Poët. fr. MSS, avant 1300, T. III, p. 976.

Le changement de l'a en e étoit très-fréquent dans notre ancienne langue. De là l'orthographe escueillir pour accueillir, comme escueil pour acueil. (Voy. ACCUEIL ci-dessus.)

Le verbe accueillir se disoit non-seulement des personnes, mais aussi des choses. Accueillir la semonce, signifioit accepter, recevoir la semonce, y obéir, y déférer. (Laur. Gloss. du Dr. fr.) " Accueillir un ajournement " (dans les Assises de Jerus. p. 41. - Voy. ibid. p. 154.) Accueillir son congé pour l'accepter, le recevoir. (Ibid. p. 101.)

D'Accueillir, recueillir, ramasser, relever, prendre ce qui est à terre, on a dit Accueillir dans le sens général et figuré de notre verbe prendre : " Entra oudit païs d'Espengne fourrager, à tout cinq cents Engloiz... et accueilloient la proye ; c'est assavoir beufs, vaches, moutons et berbis. " (Hist. de B. du Guesclin, par Ménard, p. 250.)

De là ces expressions, Accueillir sa voye, pour prendre sa route. (Anc. Poët. fr. MSS. avant 1300, T. IV, p. 1494. - Voy. Cotgr. Dict.)

Accueillir son chemin devant, pour prendre les devans. " Si accueillent leur chemin devant, et Boort son chemin après eulx. " (Lanc. du Lac, T. II, fol. 23, R° col. 1.)

Accueillir une maladie, pour prendre une maladie. (Assis. de Jérus, p. 100.)

Accueillir en haine, pour prendre en aversion. (Hist. de J. Boucicaut, liv. I, p. 89.)

Accueillir une preuve à soi, pour prendre sur soi le soin de faire une preuve. (Assis. de Jérusalem page 54.)

Accueillir son erre, pour prendre son allure. (Chron. fr. MS. de G. de Nangis, an. 1246.)

Accueillir à, etc. pour se prendre, commencer à, etc.

... Païen à l'enchauz accuillent à glatir Que toz en font les vax et les montz retentir.

Parten. de Blois, MS. de S. Germ. fol. 170, V° col. 1.

Nous disons encore figurément relever quelqu'un pour le reprendre avec aigreur, le reprimander. Accueillir, a la même signification dans ce passage. " Adonc fut mandé le comte d'Arondel devant le Duc de Lanclastre et le Comte de Cantebruge ; si fut moult grandement accueilly de ceste advenue, mais il s'excusa. " (Froiss. Vol. II, p. 34.)

En termes de vénerie, c'étoit proprement faire sortir un cerf ou autre bête de son relevé, le lancer, l'attaquer, le poursuivre ; c'est en ce sens qu'on lit, " accoillirent ung sangler " (dans Guiteclin de Sassoigne, MS. du R. fol. 138, V° col. 1.) " Les Veneurs du Roy Artus avoient accueilly ung cerf en la forest lequel vint à la fontaine pour estancher sa soif. " (Lanc. du Lac. T. III, fol. 129, V° col. 1.)

Dans un sens plus général, ce mot signifioit attaquer, poursuivre. " Trop fort estoit haï et accueilly. " (Froiss. Vol. IV, p. 24.)

Spécialement attaquer, poursuivre en justice. " L'avoit en plaid en Parlement accueilly pour la somme de cent mille francs. " (Froissart Volume IV, page 217.)

Betisac, dont il s'agit dans les deux citations précédentes, étoit l'instrument dont se servoit le Duc de Berry, pour commettre en Languedoc toutes sortes d'exactions. Il fut accueilly mortellement (en 1389), c'est-à-dire attaqué en procès criminel. C'est, je crois, le sens de cette expression dans le passage suivant, où l'on dit à ce même Betisac : " Le Roi de France, son frère et le Duc de Bourbon son oncle vous ont accueilly mortellement ; car il leur sont venues sur vous tant de plaintes... que tous vous jugent à pendre. " (Froissart vol. IV, p. 24.)

On se sert encore en Normandie du verbe accueillir, avec cette signification d'attaquer, poursuivre.

Ce mot, dans le sens de pousser, exciter, exprime une idée accessoire de poursuivre. " Le Comte Derby estoit bien accueilly de mettre un grand trouble en Angleterre, car il estoit si bien des Londriens que merveilles. " (Froissart. Volume IV, page 297.)

On accueille, on rassemble ses forces, pour faire un élan, un effort ; de là, s'accueillir, ou s'escueillir pour s'efforcer, s'élancer. " Il vint à son destrüer qu'il aplanioit doubcement... mais comme il se escueilloit pour monter, etc. " (Hist. de B. du Guescl. par Ménard, p. 370.)

(1) fortement. — (2) raillerie. — (3) et n’aspire qu’à faire exaucer ses vœux. — (4) poursuite. — (5) aboyer.