Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 2.djvu/103

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magnifiquement, et comme un homme qui ne se sentait pas de l’accident qui lui était arrivé : il paraissait même plus gai que de coutume ; et la joie de ce qu’il croyait avoir vu lui donnait un air qui augmentait encore son agrément. Tout le monde fut surpris lorsqu’il entra, et il n’y eut personne qui ne lui demandât de ses nouvelles, excepté madame de Clèves, qui demeura auprès de la cheminée sans faire semblant de le voir. Le roi sortit d’un cabinet où il était, et, le voyant parmi les autres, il l’appela pour lui parler de son aventure. M. de Nemours passa auprès de madame de Clèves, et lui dit tout bas : J’ai reçu aujourd’hui des marques de votre pitié, madame ; mais ce n’est pas de celles dont je suis le plus digne. Madame de Clèves s’était bien doutée que ce prince s’était aperçu de la sensibilité qu’elle avait eue pour lui ; et ses paroles lui firent voir qu’elle ne s’était pas trompée. Ce lui était une grande douleur de voir qu’elle n’était plus maîtresse de cacher ses sentiments, et de les avoir laissé paraître au chevalier de Guise. Elle en avait aussi beaucoup que M. de Nemours les connût ; mais cette dernière douleur n’était pas si entière, et elle était mêlée de quelque sorte de douceur.

La reine dauphine, qui avait une extrême impatience de savoir ce qu’il y avait dans la lettre que Chastelart lui avait donnée, s’approcha de madame de Clèves : Allez lire cette lettre, lui dit-elle ; elle s’adresse à M. de Nemours, et, selon les apparences, elle est de cette maîtresse pour qui il a quitté toutes les autres. Si vous ne la pouvez lire présentement, gardez-là ; venez ce soir à mon coucher pour me la rendre, et pour me