l’absence du prince son mari, elle donna quelque espérance
de sa vie. Sa santé revenait pourtant avec grand’
peine, par le mauvais état de son esprit ; et son esprit
fut travaillé de nouveau, quand elle se souvint qu’elle
n’avait eu aucune nouvelle du duc de Guise pendant
toute sa maladie. Elle s’enquit de ses femmes si elles
n’avaient vu personne, si elles n’avaient point de lettres ;
et, ne trouvant rien de ce qu’elle eût souhaité, elle se
trouva la plus malheureuse du monde, d’avoir tout
hasardé pour un homme qui l’abandonnait. Ce lui fut
encore un nouvel accablement d’apprendre la mort du
comte de Chabanes, qu’elle sut bientôt par les soins du
prince son mari. L’ingratitude du duc de Guise lui fit
sentir plus vivement la perte d’un homme dont elle
connaissait si bien la fidélité. Tant de déplaisirs si
pressants la remirent bientôt dans un état aussi dangereux
que celui dont elle était sortie : et, comme madame
de Noirmoutier était une personne qui prenait
autant de soin de faire éclater ses galanteries que les
autres en prennent de les cacher, celles du duc de
Guise et d’elle étaient si publiques, que, toute éloignée
et toute malade qu’était la princesse de Montpensier,
elle les apprit de tant de côtés, qu’elle n’en put douter.
Ce fut le coup mortel pour sa vie : elle ne put résister à
la douleur d’avoir perdu l’estime de son mari, le cœur
de son amant, et le plus parfait ami qui fut jamais.
Elle mourut en peu de jours, dans la fleur de son âge,
une des plus belles princesses du monde, et qui aurait
été sans doute la plus heureuse, si la vertu et la prudence
eussent conduit toutes ses actions.