Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/136

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étaient devenus amoureux, lui, de mademoiselle d’Auxi, et Mauny, de mademoiselle de Liancourt, toutes deux sous la puissance de leurs frères, qui avaient résolu de faire un double mariage, et, dans cette intention, les avaient fait élever ensemble, sous la conduite d’une vieille grand’mère de mademoiselle de Liancourt. L’une et l’autre, révoltées du joug qu’on voulait leur imposer, s’étaient affermies dans la résolution de n’épouser que quelqu’un qu’elles pussent aimer.

M. de Clisson et M. de Mauny leur inspirèrent les sentiments qu’elles voulaient avoir pour leurs maris. Il fut résolu entre eux qu’elles prendraient leur temps pour sortir de la maison de madame de Liancourt ; que leurs amants, après avoir reçu leur foi, les emmèneraient en Bretagne. Mauny fut obligé de passer en Angleterre ; il avait de fortes raisons pour ne pas déclarer son mariage, et Clisson fut chargé seul de l’exécution du projet. Les dames, après s’être sauvées la nuit, étaient venues se réfugier dans cette maison du faubourg, où elles étaient cachées depuis deux jours, lorsque Clisson et moi les allâmes chercher.

Les deux frères, avertis de leur fuite, ne doutèrent pas que Clisson n’en fût l’auteur ; aucun soupçon ne tomba sur M. de Mauny qui était absent depuis assez longtemps. M. d’Auxi et M. de Liancourt appelèrent M. de Clisson en duel, persuadés que celui qu’il choisirait pour second ne pourrait être que le ravisseur de mademoiselle de Liancourt. La crainte qu’on ne découvrît le lieu où ces dames étaient cachées obligea Clisson, après le combat, de me prier de l’aider à les en tirer. Je juge que M. de Mauny a fait passer sa