Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/405

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qui avait voulu cacher la honte de mon aventure, avait pris soin de publier qu’il était mort d’apoplexie dans ses terres du Gévaudan.

J’allai m’enfermer avec ma chère Eugénie ; et, sans m’engager par des vœux, je renonçai au monde pour jamais. Mes malheurs m’ont fourni, pendant un grand nombre d’années, assez d’occupation pour vivre dans la solitude. Le temps a enfin un peu affaibli la vivacité du sentiment ; mais il m’est resté un fonds de tristesse et de mélancolie qui m’accompagnera jusqu’à mon dernier moment. La fortune de ce malheureux enfant est la seule chose qui a pu faire quelque distraction à ma douleur. Je l’ai mis de bonne heure dans les troupes ; il y jouit d’une réputation brillante : il est actuellement dans les premiers grades. J’ai cru devoir lui laisser toujours ignorer ce qu’il est. Il ne sait pas même d’où lui vient le bien qu’il reçoit : j’ai mieux aimé renoncer à sa reconnaissance que de lui donner la mortification de se connaître.