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Page:La Femme libre, 1832.pdf/17

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croyant voir dans notre amour pour la liberté un penchant vers la licence. Maintenant ils jugent d’après leurs principes, et leurs principes n’ont eu pour conséquences que le mensonge et l’effronterie. Pouvait-il en être autrement, quand pesaient sur nous des obligations que notre nature nous rendait inobservables ; et comment serions-nous fausses quand on ne nous fera plus un crime d’être ce que Dieu nous a faites, des femmes aimantes ? Et, par la même raison, comment l’effronterie trouverait-elle place chez nous, quand on ne nous fera plus un devoir de cette froide réserve, si gênante pour certains caractères ? La liberté donnera l’essor au génie de la femme, à toutes ses facultés intellectuelles ; elle sera belle de franchise et de candeur ; et à mesure qu’elle s’éloignera de ce monde de ruse et de mensonge, elle s’éloignera des vices où il l’a entraînée. Bientôt elle ne connaîtra plus que de douces obligations ; et n’étant plus forcée de marcher dans la voie étroite, elle ne sera plus en danger de tomber dans le gouffre de dissolution. Alors disparaîtront ces abîmes de vices où sont englouties tant de femmes ; mais elles n’y sont tombées que parce que ceux qui se scandalisent de notre liberté les y ont précipitées. Ils n’ont pas craint la licence pour les malheureuses qu’ils ont séduites et à qui ils ont ôté tout retour au bonheur et au respect, et ils la craignent pour celles qui veulent s’affranchir de leur tyrannie et de leur exploitation ; et tel qui nous désapprouve en public nous approuverait en secret si nous usions de notre liberté pour favoriser ses projets de séduction. Quelle confiance accorder à des opinions si contradictoires ? Pour moi, je n’en accorde aucune, et je n’ai jamais été la dupe de la bienveillance qu’affectent ceux qui veulent me faire envisager ma liberté comme un opprobre.

Vous, donc qui souffrez de la contrainte que vous impose la société ; vous, qui avez un cœur si aimant et qui voyez ce cœur méconnu, peut-être outragé par des mépris qu’il ne mérita jamais, secouez le joug, répondez à l’appel qui vous a été fait par des hommes qui se sacrifient pour vous affranchir. N’en croyez pas la renommée, connaissez-les avant de les juger. Moi aussi je les ai raillés, car j’avais écouté leurs