Page:La Fontaine - Œuvres complètes - Tome 4.djvu/70

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Phœdrie

Mon retour en ces lieux est peut-estre impreveu ;
Vous ne m’attendiez pas apres tant d’asseurances.

Pythie

Tousjours de la facon trompez nos esperances,
La surprise nous plaist, pourveu que le Soldat
Laisse passer le tout sans bruit, et sans éclat.

Phœdrie

Nous sçaurons l’adoucir, quoy qu’il tranche du braye.

Thaïs

Vous a-t-on pas prié d’amener cét esclave
Que pour servir ma sœur vous aviez achepté,
Et que vostre valet m’a tantost presenté ?

Phœdrie

Le voilà.

Thaïs

Le voilà. Quoy cét homme à la peau si flestrie ?
Parlez-vous tout de bon, ou si c’est raillerie ?

Pythie

Qui n’auroit point eu d’yeux, seroit bien attrapé.

Phœdrie

Je n’en sçache point d’autre, ou les miens m’ont trompé.
Mais pourquoy jettez-vous cét éclat de risée ?

Pythie

L’autre a le teint plus frais qu’une jeune espousée ;
Il ne sçauroit avoir que vingt ans tout au plus,
Et vous nous amenez un vieillard tout perclus.

Phœdrie

Tu me tiens des propos où mon esprit s’égare.

Thaïs, regardant Dorus

Ce que cét homme en sçait, il faut qu’il le declare.