Page:La Fontaine - Contes, Herhan, 1803.djvu/171

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Dans les esprits, dans les cœurs même aussi.
Qui ne connaît l’inimitable actrice
Représentant ou Phèdre, ou Bérénice
Chimène en pleurs, ou Camille en fureur ?
Est-il quelqu’un que votre voix n’enchante ?
S’en trouve-t-il une autre aussi touchante ?
Une autre enfin allant si droit au cœur ?
N’attendez pas que je fasse l’éloge
De ce qu’en vous on trouve de parfait
Comme il n’est point de grâce qui n’y loge
Ce serait trop, je n’aurais jamais fait.
De mes Philis vous seriez la première.
Vous auriez eu mon âme toute entière
Si de mes vœux j’eusse plus présumé,
Mais en aimant qui ne veut être aimé ?
Par des transports n’espérant pas vous plaire,
Je me suis dit seulement votre ami ;
De ceux qui sont amants plus d’à demi :
Et plût au sort que j’eusse pu mieux faire.
Ceci soit dit : venons à notre affaire.

Un jour Satan, monarque des enfers,
Faisait passer ses sujets en revue.
Là confondus tous les états divers,
Princes et rois, et la tourbe menue,
Jetaient maint pleur, poussaient maint et maint cri,
Tant que Satan en était étourdi.
Il demandait en passant à chaque âme :
« Qui t’a jetée en l’éternelle flamme ? »
L’une disait : « Hélas c’est mon mari ; »
L’autre aussitôt répondait : « c’est ma femme. »
Tant et tant fut ce discours répété,
Qu’enfin Satan dit en plein consistoire :
«