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Ce fut leur avantage : ils eurent bonne année,
Pleine moisson, pleine vinée.
Monsieur le receveur fut très mal partagé.
L’an suivant, voilà tout changé :
Il ajuste d’une autre sorte
La température des cieux.
Son champ ne s’en trouve pas mieux ;
Celui de ses voisins fructifie et rapporte.
Que fait-il ? Il recourt au monarque des dieux ;
Il confesse son imprudence.
Jupiter en usa comme un maître fort doux.

Concluons que la Providence
Sait ce qu’il nous faut mieux que nous.


V

LE COCHET[1], LE CHAT ET LE SOURICEAU

Un souriceau tout jeune, et qui n’avait rien vu,
Fut presque pris au dépourvu.
Voici comme il conta l’aventure à sa mère :
J’avais franchi les monts qui bornent cet état,
Et trottais comme un jeune rat
Qui cherche à se donner carrière.
Lorsque deux animaux m’ont arrêté les yeux :
L’un doux, bénin, et gracieux,
Et l’autre turbulent, et plein d’inquiétude ;
Il a la voix perçante et rude,
Sur la tête un morceau de chair,
Une sorte de bras dont il s’élève en l’air
Comme pour prendre sa volée,
La queue en panache étalée.

  1. Jeune coq.