Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 12.djvu/210

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ils font profession de mener une vie très-dure, voyageant sans cesse dans les montagnes saintes, vivant de racines pendant ces voyages, et se baignant dans l’eau froide au cœur même de l’hiver.

Les Fekis sont les quinze-vingts du Japon, mais leur origine est plus héroïque. L’empire était partagé en deux factions principales. L’empereur Feki avait pour lui la première, et le cubosama, nommé Ghendz, était à la tête de la seconde. Chacune prit le nom de son chef, et ces divisions remplirent long-temps le Japon de sang et d’horreur. Après une longue variété de succès, les ghendzis gagnèrent l’avantage, par l’habileté d’Ioritomo, devenu cubosama, qui gagna une bataille décisive où l’empereur fut tué. Ce malheureux monarque avait un général d’une bravoure et d’une force qu’on croyait surnaturelle : son nom était Kakckigo. Il s’était sauvé avec les débris de l’armée vaincue ; mais il fut pris ensuite par les troupes victorieuses. Ioritomo l’estimait ; il voulut se l’attacher. Ce brave guerrier lui répondit : « J’ai été fidèle serviteur d’un bon maître ; il est mort : personne ne se vantera jamais que j’aie eu pour lui la même fidélité et la même affection. J’avoue que je vous dois la vie ; mais mon malheur est tel, que je ne puis tourner les yeux sur vous sans me sentir le désir de vous ôter la vie pour venger mon maître. La fortune me réduit à ne pouvoir vous marquer la reconnaissance que je dois