Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 12.djvu/333

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vivantes entre ses mains ; il pria ses officiers de monter avec lui dans la partie la plus élevée du fort, et, donnant la liberté aux deux oiseaux, il dit à ceux qui l’avaient suivi qu’il ne pouvait se résoudre à faire un bon repas tandis qu’il les voyait mourir de faim.

Ce n’était pas le seul mal qui le tourmentait. Depuis quelque temps il souffrait de vives douleurs qui troublaient jusqu’à son sommeil ; on a cru qu’elles venaient d’un commerce trop libre avec les femmes de l’île. Mais les attribuant au climat, ou à la mauvaise qualité des alimens, il prit enfin la résolution de retourner en Espagne : ce dessein le conduisit à Isabella, où son mécontentement et le mépris qu’il avait pour la nouvelle noblesse du gouverneur lui firent éviter de le voir. Il ne garda pas plus de ménagement dans ses discours ; et cette conduite lui fit un grand nombre de partisans, entre lesquels Boyl affecta de se distinguer. Ce missionnaire publia qu’il allait détromper les rois catholiques des fausses idées qu’on leur faisait concevoir de l’amiral et de ses entreprises ; et, joignant l’effet aux menaces, il partit avec Margarita sur des navires qui venaient d’apporter don Barthélemi, frère de Colomb. En arrivant à la cour d’Espagne, leur haine se déchaîna contre les Colomb : ils publièrent qu’à la vérité Espagnola avait un peu d’or ; mais qu’on en verrait bientôt la fin, et qu’un avantage si léger ne valait pas tant de dépenses, ni le sacrifice d’un si grand nom-