Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 14.djvu/323

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tie de la rançon d’Atahualpa qu’on y avait déjà rassemblée. Quelle fut son admiration à la vue de ces prodigieux monceaux d’or et d’argent ! Mais sa surprise fut encore plus grande lorsque les soldats de Pizarre lui déclarèrent que de nouveaux-venus ne devaient pas espérer d’entrer en partage avec les vainqueurs. Cette contestation eut de tristes suites ; cependant Pizarre, qui se voyait le plus fort par le nombre et la faveur des troupes, feignit de ne pas remarquer le mécontentement d’Almagro, et prit occasion de son arrivée pour envoyer Fernand, son frère, en Espagne. Il était question de rendre compte à la cour des progrès de la conquête, et de faire à l’empereur une riche part du butin. Cette résolution ne fut affligeante que pour Atahualpa, qui se voyait enlever dans Fernand Pizarre le seul Espagnol auquel il eut accordé sa confiance. D’ailleurs une comète qui paraissait depuis quelque temps l’avait jeté dans une nouvelle consternation. Lorsqu’il vit don Fernand prêt à partir, il lui dit : « Vous me quittez, capitaine ! je suis perdu. Je ne doute point qu’en votre absence ce gros ventre et ce borgne ne me fassent tuer. » Le borgne était don Diègue d’Almagro, qui avait perdu un œil dans une action contre les Américains ; et le gros ventre, Alfonse de Requelme, trésorier de l’empereur.

Le gouverneur embarqua pour l’Espagne cent mille pesos d’or et cent mille autres en