Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 16.djvu/337

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même le temps de les faire sécher. Il se détermina donc à retourner vers l’est, dans le dessein de reconnaître mieux toutes les parties du fleuve : observation importante qu’il se reprochait d’avoir négligée.

En quittant l’embouchure du Caroni, il alla mouiller le premier jour au port de Morquito, qu’il regardait comme un séjour de confiance, par celle qu’il avait dans le caractère de Topiaouari. Le vieux cacique, qu’il fit avertir de son arrivée, se hâta de le venir voir, suivi d’une abondante provision de vivres. Après des caresses fort tendres, Raleigh, qui avait formé un petit camp sur une éminence, au bord du fleuve, fit sortir tout le monde de sa tente pour s’entretenir seul avec ce sage vieillard. On doit concevoir néanmoins que ces entretiens ne se faisaient pas sans un interprète. C’est dans la bouche de l’auteur qu’il faut laisser des explications de cette importance.

« Je commençai par lui dire que, lui connaissant une haine égale pour les Éporémérios et pour les Espagnols, j’attendais de lui qu’il m’apprendrait le chemin de la ville impériale des incas. Il me répondit qu’il ne s’était pas figuré que mon dessein fût de prendre cette route, non-seulement parce que la saison ne me le permettait pas, mais plus encore parce qu’il ne me croyait pas assez de monde pour une si dangereuse entreprise ; que, si je m’obstinais à la tenter avec si peu de forces, il m’assurait que j’y trouverais ma perte ; que la puissance