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de cribles de jonc. Au bout de huit ou dix jours, on passe l’eau dans des tamis de toile. La matière colorante reste sur la toile ; on lui fait jeter un bouillon sur le feu, ensuite on la fait sécher dans des caisses et à l’ombre. Tel est le rocou du commerce, qui est plus ou moins pur, plus ou moins vif en couleur, selon le soin qu’on a mis à le fabriquer. Pour être d’une bonne qualité, le rocou doit être de couleur de feu, plus vif en dedans qu’en dehors, doux au toucher. Celui qui a été séché au soleil est noir. Celui qui, n’ayant pas été bien desséché, a moisi, est d’un rouge pâle. Celui qui est frelaté ne se dissout pas complétement dans l’eau. Le meilleur est celui qu’on obtient par le simple froissement des graines dans l’eau entre les mains ; mais on n’emploie guère cette méthode, à cause de la perte de matière qui en résulte. C’est celle que les Caraïbes employaient pour se procurer le rocou avec lequel ils se teignaient le corps, en le mêlant avec de l’huile.

C’est à Cayenne qu’on prépare le mieux le rocou ; aussi celui de cette colonie a-t-il une valeur supérieure à celui de toutes les autres dans les marchés de l’Europe. La préparation du rocou expose les nègres à des maux de tête, et même à des vertiges ; car, pendant sa fermentation, il est d’une odeur insupportable. L’agréable odeur de violette qu’on lui connaît en Europe ne se développe que dans la dessiccation.