Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 19.djvu/91

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pour servir de fanal à ceux qui auraient le malheur de s’égarer ; mais le souvenir des ours arrêtait les plus hardis. Le 5, on fut étonné de voir la mer ouverte aussi loin que la vue pouvait s’étendre, sans que les glaces où le vaisseau était pris eussent commencé à se fondre. « Il semblait, dit Gérard de Veer, qu’on eût bâti exprès un mur de glace d’environ trois pieds de haut pour l’entourer ; et l’on reconnut que l’espace d’eau qu’il occupait était gelé jusqu’au fond, c’est-à-dire, de trois brasses et demie. » Le même jour on dépeça le gaillard d’avant pour employer les planches à couvrir la hutte ; et cette couverture, qui reçut la forme d’un toit à deux égouts, fut achevée vers le soir. Le jour suivant, la chambre de poupe fut aussi dépecée pour revêtir le tour de la hutte.

Le vent, qui avait soufflé avec violence pendant la nuit du 7 au 8, continua tout le jour, et fut suivi d’une neige si épaisse, qu’on n’aurait pu sortir sans s’exposer au danger d’en être étouffé. D’ailleurs il était absolument impossible de soutenir au dehors la rigueur du froid. Le 9, l’air s’étant assez adouci pour laisser la liberté de sortir, un matelot rencontra un ours, qu’il n’aperçut qu’à peu de distance ; et, dans sa première frayeur, il se mit à courir vers le vaisseau. L’ours le poursuivit, et n’aurait pas tardé à le joindre, s’il n’eût été arrêté par la vue du dernier ours qu’on avait tué et qu’on voulait faire geler à l’air. Il de-