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DE SOCRATE


Auſſi ne pouvoient ils pas être touchés d’une ſi honteuſe paſſion, dans une vie ſi Chrétienne & ſi parfaite que la leur. Rien ne les a portés à cela que l’extrème impieté des Payens, contre qui ils étoient tous les jours aux priſes, & qui oſoient bien non ſeulement préferer Phocylide, Theognis, Iſocrate, & ces Philoſophes[1], comme ſaiſoit Julien l’Apoſtat, à Salomon, à Moïſe, & à nos plus grands Saints : mais paſſer même juſqu’à cette abomination, de comparer la créature à ſon Créateur, l’homme à Dieu, & Socrate, Epictete, Apollonius, ou quelque autre à Jeſus Chriſt. Pour reſiſter à une ſi folle opinion qu’ils avoient de leurs Philoſophes, Cyrille d’Alexandrie, Gregoire de Nazianze, & Théodoret, n’ont fait nulle difficulté de les déprimer de tout leur poſſible, & ont crû même qu’ils étoient obligés de les diffamer, pour le bien de tant d’ames, qui ſe perdoient en les eſtimant trop, & vû qu’on rendoit leur vertu criminelle, la comparant à celle de nôtre Seigneur. Voilà le fondement de tout ce que nous avons contre Socrate, Platon, & quelques autres de même profeſſion, parmi les écrits des Peres, Et certes je crois que dans un tems pareil au leur, nous ſerions encore obligés d’en uſer de la ſorte. Mais

  1. D. Cyr. En. cont. Iul. & paſſim.
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