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DE LA VERTU DES PAY. II. PART.


ſon Apoſtaſie. On peut ajoûter à cela l’hon neur, qu’il fit rendre à ſon cadavre, que toute l’Armée accompagna juſques dans la ville de Tarſe, où il le fit laiſſer comme en dépôt, avec un Epitaphe, dans lequel il eſt nommé très bon Roi, & très excellent guerrier.

Ne ſait on pas auſſi[1], que ce grand applaudiſſement, avec lequel le même Iovien fut reçû de toute la Milice, lorſqu’il fut proclamé Empereur, ne proceda que de la reſſemblance de ſon nom à celui de Iulien, qui ne différoit que d’une lettre ? Or il eſt certain, qu’une bonne partie de cette Milice étoit Chrétienne ; ce que témoigne aſſez l’élection, qu’elle fit d’un Prince de nôtre Réligion. D’où pouvoit donc partir un ſi grand témoignage d’affection à la mémoire d’un Idolâtre, perſecuteur des Fideles, ſi nous ne l’attribuons aux vertus éclatantes & vraiement Imperiales, qui ne laiſſoient pas de le faire aimer, & de le rendre recommandable ?

Et véritablement ſa fin ſeule, quand le reſte de ſes actions n’y eût rien contribué, lui pouvoit acquerir cette grande reputation. Car la façon douteuſe, dont en parle Saint Grégoire, fondée, ſur quelques bruits, qu’on fit alors courir, & ſur les raiſons, que nous avons dit, qu’il avoit de le décréditer, mê-

  1. Zoſimus lib. 3.
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