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LA NATURE.

faible que celle obtenue avec un poids égal de charbon ; il importe donc, si l’on ne veut dépenser du combustible en pure perte, d’agrandir le foyer et de réduire, autant que possible, le volume de la paille employée pour le chauffage. Une autre difficulté inhérente au procédé consiste dans l’accumulation, sur les grilles du foyer, d’une quantité énorme de matières siliceuses qui finiraient, par les obstruer complètement si l’on n’y prenait garde. Il en résulterait que le tirage nécessaire à la combustion ne s’effectuant plus, la boîte à feu se trouverait bientôt encombrée par le combustible éteint.

Pour obvier à ces divers inconvénients, les inventeurs emploient les dispositions suivantes : ils agrandissent un peu le foyer ; d’autre part, ils remplacent la grille ordinaire à coke par une autre, dont les barreaux sont écartés de dix centimètres environ ; dans chacun des intervalles de ces barreaux passe une dent d’une sorte de râteau, monté sur une tige mise à portée de la main du mécanicien. Il suffit de manœuvrer de temps en temps cette tige pour faire tomber les cendres accumulées sur la grille ; un tuyau relié à la pompe d’alimentation et aboutissant au cendrier permet au besoin d’inonder d’eau froide les cendres brûlantes que le vent pourrait emporter.

Lorsqu’il s’agit d’introduire la paille dans le foyer, on la place d’abord dans une sorte d’auge disposée comme l’indique la figure ; cette paille vient alors s’engager entre deux rouleaux cannelés tournant en sens contraire, qui la chassent dans l’intérieur où elle est brûlée successivement avec une régularité parfaite. Au moment où l’on commence à allumer le feu, ces rouleaux sont mus par la main d’un homme ; mais une fois la machine mise en train, une courroie sans fin entretient automatiquement leur mouvement de rotation ; il suffit dès lors d’un enfant pour remplacer la paille à mesure qu’elle est consumée. Enfin si l’on veut utiliser le charbon dans les foyers Schemioth, une manœuvre très-simple permet de changer la grille et la plaque d’arrière de la boîte à feu. Une de ces locomobiles figure, en ce moment, à l’Exposition universelle de Vienne[1].

P. de Saint-Michel.

CHRONIQUE

Le protoxyde d’azote. — Le protoxyde d’azote, dont un grand nombre de dentistes font aujourd’hui usage comme anesthésique, a été découvert par l’illustre Priestley en 1772. C’est en avril 1799 que sir Humphry Davy expérimenta sur lui-même l’action de ce gaz sur l’économie animale. Les sens et l’esprit du célèbre chimiste anglais furent exaltés à tel point par l’inspiration du protoxyde d’azote qu’il fut transporté dans une véritable extase. Il proposa de désigner le protoxyde d’azote sous le nom de gaz hilarant.

Malgré les nombreuses expériences auxquelles le protoxyde d’azote a été soumis depuis, les opinions les plus contradictoires ont été émises relativement à son action physiologique. Les deux points de l’action de ce gaz, comme gaz respirable et comme agent anesthésique, encore aujourd’hui controversés, viennent d’être élucidés par MM. F. Jolyet et T. Blanche.

Ces expérimentateurs ont placé des graines d’orge et de cresson sous des cloches contenant le protoxyde d’azote pur ; les graines n’offraient aucune trace de germination, même après un espace de temps de quinze jours. D’autres graines semblables placées de la même façon dans l’air atmosphérique sont entrées en pleine, germination le troisième jour. MM. Jolyet et Blanche ont reconnu que le gaz hilarant arrêtait complètement le développement des graines germées et que celui-ci se continuait dès que l’accès était ouvert à l’air atmosphérique. Ils ont constaté que les fonctions essentielles de la respiration ne peuvent pas non plus s’effectuer dans une atmosphère de protoxyde d’azote pur. Des oiseaux y sont morts en trente secondes, des lapins et des chiens en quelques minutes.

Dans une seconde série d’expériences, les savants dont nous analysons le curieux travail, ont recherché si le protoxyde d’azote possède réellement les propriétés anesthésiques qu’on lui attribue. Le protoxyde d’azote mélangé de 18 à 21 pour 100 d’oxygène, n’a causé sur des chiens aucun affaiblissement appréciable de la sensibilité ; des moineaux placés sous des cloches contenant un semblable mélange gazeux, sont morts après avoir transformé par leur respiration l’excès d’oxygène en acide carbonique. Chez les animaux respirant le protoxyde d’azote pur, les auteurs ont constaté, en excitant, à divers moments, le nerf sciatique, que la sensibilité disparaissait chez l’animal entre la troisième et la quatrième minute, c’est-à-dire à un moment où l’animal offrait tous les signes de l’asphyxie, comme l’a prouvé d’une manière irrécusable l’analyse des gaz extraits de son sang. MM. Jolyet et Blanche concluent de leurs remarquables investigations que si le protoxyde d’azote peut à un certain moment déterminer l’anesthésie, c’est par privation d’oxygène dans le sang, c’est-à-dire par asphyxie[2].

Est-il prudent d’après ces recherches et ces résultats d’employer le protoxyde d’azote, dans les opérations chirurgicales et dans l’extraction des dents ? La réponse évidemment semble devoir être négative. Cependant nous ne pouvons nous empêcher de faire observer que depuis longtemps bien des personnes ont supporté l’action du protoxyde d’azote, sans qu’il en soit résulté aucun accident.

Une forêt submergée sous la Tamise. — On sait en Angleterre qu’à Plumstead, à Dagenham et dans d’autres parties de la Tamise, entre Woolwich et Erith, on peut voir à la marée basse les restes d’une forêt submergée sur laquelle le fleuve coule aujourd’hui. Ce fait a été décrit il y a environ cent cinquante ans par le capitaine Perry. En 1817, le doyen Guckladd en a fait l’objet d’un mémoire qu’il a présenté à la Société géographique de Londres.

Un assez grand nombre de membres de l’association géologique, se sont récemment rendus à la station d’Abbey Wood et, de là à travers les marais, de Plumstead à Crossness, où des barques les attendaient pour aller visiter les restes de cette forêt submergée et les sommets émergeant des arbres sur les bords de la rivière…

On avait fait des excavations dans les marais à environ

  1. Les documents de cet article sont empruntés à l’Engineering.
  2. Comptes rendus de l’Académie des sciences, t. LXXVII, no 1 (7 juillet 1873).