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LA NATURE.

avaient été diminuées, a eu lieu le 6 octobre de Capitoline Grounds (New-York). Le vent, qui semblait pousser les voyageurs aériens vers la mer, les a rejetés vers le nord. Ils sont arrivés après quatre heures de voyage à New Canaan (Connecticut), ayant parcouru une distance totale d’environ 120 kilomètres. L’ascension s’est terminée d’une façon qui n’est point nettement expliquée, mais il semble que le ballon s’est choqué contre une colline.

Cet accident, peu ordinaire, a mis le désarroi dans l’équipage, qui a sauté à terre. Le ballon, abandonné à son malheureux sort, a été retrouvé à un mille de distance. Cette ascension malheureuse est cependant digne de marquer sous certain point de vue dans les annales de la science, car les aéronautes ont, pendant ce court voyage, lancé six fois du haut des airs des pigeons qui sont revenus en quelques minutes au point de départ.

Le télégraphe du Colorado. — On vient d’établir dans le Colorado, aux États-Unis, une nouvelle ligne télégraphique qui passe au sommet du pic de Peak. Cette montagne à plus de 3 000 mètres d’élévation. La station télégraphique qui a été construite à son sommet est à un niveau qui dépasse de beaucoup celui des stations créées jusqu’ici sur les montagnes. Elle sert de poste météorologique, et, trois fois par jour, elle envoie à Washington une dépêche donnant l’état de l’atmosphère.


ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 10 novembre 1873. — Présidence de M. de Quatrefages

La Société Ramond. — Au moment de partir pour Biskra, et peut-être pour Tugurt, M. Charles Sainte-Claire Deville signale à l’Académie le zèle avec lequel la météorologie est cultivée dans les Pyrénées. À Bagnères-de-Bigorre, la Société Ramond, toujours digne de l’illustre nom qu’elle porte, et grâce à l’initiative de son président, M. le pasteur Frossard, vient, de concert avec une seconde société dont le siège est au col de Sincourse, de fonder un véritable observatoire météorologique. Il consiste en deux pièces prélevées sur une hôtellerie, établie au pied même du Pic-du-Midi, à 2 354 mètres d’altitude, et où l’on a disposé tous les appareils et tous les instruments nécessaires. Grâce à des systèmes d’observations simultanées, faites les unes à l’observatoire et les autres au sommet de la montagne, à 2 870 mètres, on a déjà un nombre considérable de résultats importants. Sans doute, ces résultats seraient plus grands encore si la Société Ramond jouissait de moyens d’action plus étendus ; et il faut remarquer qu’il suffirait, pour les lui procurer, que le gouvernement la reconnût comme établissement d’utilité publique, car alors, outre le prestige de cette désignation officielle, elle acquerrait la faculté de recevoir des dons et des legs. Grâce au chaleureux appui que témoignent à cette œuvre, d’abord M. Dumas, puis M. Élie de Beaumont et enfin le président lui-même, il est à espérer que cette consécration désirable ne se fera plus longtemps attendre.

Le titane des basaltes. — Analysant une nombreuse série de roches basaltiques d’Auvergne, M. Roussel y a presque constamment trouvé du titane et du vanadium. Ce dernier est en quantité trop faible pour être dosé, mais on le reconnaît facilement. Au contraire, le titane est parfaitement dosable, et représente ordinairement 0,75 pour 100 de la roche, quelquefois même, comme dans le basalte du Puy-de-Dôme, il s’élève à 2 pour 100 et même à 2,5.

Solubilité du plomb dans l’eau. — L’hygiène s’est préoccupée, à maintes reprises, de la solubilité du plomb dans l’eau, et des conséquences d’insalubrité qui peuvent en résulter. Aujourd’hui, M. Fordos, chimiste bien connu par des travaux importants, reprend la question. Il montre que l’eau aérée attaque le plomb et donne lieu à la formation du carbonate de plomb ou céruse. Si l’expérience se fait dans un vase de verre, la céruse se précipite sur les parois et les recouvre d’une couche mince, de façon que les bouteilles rincées à la grenaille sont comme doublées d’une pellicule de matière toxique.

En résumant ces faits, M. Dumas rappelle l’expérience qu’il faisait il y a vingt ans devant l’auditoire de son cours de chimie de la Sorbonne : dans une série de flacons on mettait de l’eau distillée, de l’eau de pluie, de l’eau de Seine, etc., puis, dans chacun d’eux, on introduisait du plomb. Or on n’était pas arrivé au quatrième flacon, que ce temps si court suffisait pour que l’eau distillée du premier donnât déjà très-nettement les réactions saturnines. Toutefois, ce résultat n’a lieu qu’avec de l’eau très-pure ; la moindre trace de sel calcaire rend, pour ainsi dire, le plomb insoluble. M. Balard et M. Chevreul s’empressent de confirmer cette conclusion en ajoutant que le rôle le plus énergique, pour empêcher la solution, est dévolu aux sulfates et spécialement aux sulfates de chaux. Une longue lecture de M. Beigrand roule sur le même sujet et confirme ce fait, que l’eau un peu minéralisée passe sans inconvénient dans des tubes de plomb, tandis que l’eau distillée se charge rapidement de sel métallique.

Un exemple ancien, rappelé par M. Dumas, montre bien cette énergie dissolvante de l’eau distillée. Il y a quelques années des accidents saturnins (coliques de plomb, etc.) se manifestèrent dans l’équipage d’un vaisseau. On reconnut que le poison était apporté par l’eau, obtenue à bord par distillation ; or l’alambic n’offrait pas trace du plomb, le serpentin n’en contenait pas ; il n’y avait, en plomb, qu’un petit tuyau de quelques centimètres, que l’eau traversait pour se rendre du serpentin dans le réservoir où on la conservait.

Exhalation des plantes. — Reprenant un sujet déjà traité par de nombreux chimistes, et récemment par notre collaborateur M. P.-P. Dehérain, M. Barthélemy, professeur au lycée de Toulon, étudie l’évaporation à laquelle donnent lieu les plantes. Cette exhalation peut, suivant lui, se faire de trois manières : insensiblement, comme c’est le cas le plus général ; où bien par émission brusque de gaz saturé, qui s’échappe par les stomates, lorsque la plante subit une élévation subite de température ; ou bien enfin par exsudation, quand le travail d’absorption des racines est plus actif que le travail de fixation du carbone ; ce cas a lieu, par exemple, dans l’obscurité.

Thermomètre moteur. — Voici une idée originale, mais qui ne paraît guère susceptible d’application sérieuse. Autour d’une roue à axe horizontal, M. de Paz dispose, suivant les rayons, une série de thermomètres bien égaux. Cela fait il expose une moitié de la roue au soleil, l’autre étant maintenue à l’ombre. Le tuyau des thermomètres échauffés se dilatant, leur centre de gravité s’éloigne du centre de suspension ; c’est comme s’ils étaient devenus plus lourds ; ils font tourner la roue.

Stanislas Meunier.




Le Propriétaire-Gérant : Gaston TISSANDIER.

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