Page:La Revue blanche, t25, 1901.djvu/571

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

voie. C’est seulement si l’on suppose que tout sujet connaissant est en même temps individu et, par là, une part de la nature, qu’il a accès dans l’intérieur de la nature. Il y pénètre en descendant dans sa propre conscience personnelle où il se manifeste dans une immédiateté absolue, en même temps que comme volonté. »

Si nous admettons la condition exigée par Schopenliauor pour que l’idée puisse entrer dans notre conscience, soit : « une prédominance temporaire de l’intellect sur la volonté, ou, au point de vue physiologique, une forte excitation de la faculté contemplative excluant celle des penchants ou des sentiments », il nous reste encore, à bien saisir la pensée de Schopenhauer, quand il nous parle des deux faces de la conscience : il veut dire qu’elle est en partie conscience du moi propre qui est la volonté, en partie conscience d’autres choses et, comme telle, tout d’abord connaissance contemplative du monde extérieur, conception des objets. « Maintenant, plus un côté de la conscience totale apparaît, plus l’autre se retire. »

L’étude approfondie de cette doctrine empruntée à l’œuvre fondamentale de Schopenhauer, nous montrera avec évidence que la conception musicale, n’ayant rien de commun avec la conception d’une idée (car celle-ci est absolument liée à la connaissance contemplative du monde), ne peut avoir son origine que dans cette partie de la conscience qui regarde à l’intérieur. Si cette dernière doit, pour un temps, se retirer complètement pour permettre au sujet connaissant d’entrer dans ses fonctions (la conception des idées), c’est seulement par ce côté de la conscience tournée vers l’intérieur que la disposition de l’intellect à concevoir le caractère des choses devient explicable. Si cette conscience est la conscience du moi propre et ainsi de la volonté, sa mise à l’arrière plan est indispensable pour que la conscience contemplative tournée vers l’extérieur se dégage, mais l’essence de la chose en soi, insaisissable à cette contemplation extérieure, ne pourrait être accessible à la conscience tournée vers l’intérieur que si celle-ci arrivait avoir aussi clair à l’intérieur que l’autre, à l’extérieur, pour la conception des idées.

Schopenhauer nous aide à avancer dans cette voie par son hypothèse profonde relative au phénomène physiologique du somnambulisme et par la théorie du rêve qu’il en déduit. Si, dans ce phénomène, la conscience tournée vers l’intérieur atteint à une réelle clairvoyance, c’est-à-dire à la faculté de voir, là où notre conscience éveillée, tournée au jour, ne parçoit qu’obscurément la base puissante des émotions de notre volonté, de cette nuit aussi le son pénètre, comme expression immédiate de la volonté, dans la perception véritablement éveillée. Comme le rêve, à chaque expérience, le constate, à côté du monde contemplé au moyen des fonctions du cerveau éveillé, il y en a un second d’une égale netteté, se manifestant également comme sensible qui, en aucun cas, comme objet ne peut se trouver hors de nous et par suite doit être porté à la connaissance de la conscience par une fonction du cerveau dirigée vers l’intérieur, sous la forme particulière