Page:La Revue hebdomadaire, Octobre 1908.djvu/220

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— Médiocre, comme la ration d’hier au soir, après que ce rat musqué eut passé dessus, répondit Polaris, un poney gris à l’avant-main quelque peu lourd.

Et le reste du team se montra d’accord avec lui.

— Plus tôt on oublie cela, mieux cela vaut, dit le Chat Maltais d’un ton de bonne humeur. Ils ont fini le tiffin[1], dans la grande tente, c’est le moment où on va nous réclamer. Si vos selles ne sont pas mises comme il faut, ruez. Si vos mords vous gênent, cabrez-vous et laissez les saïs voir si vos guêtres sont trop serrées.

Chaque poney avait son saïs, son groom, lequel habitait, mangeait et dormait avec lui, et toujours avait parié beaucoup au delà de ses moyens sur le résultat de la partie. Rien à craindre, tout irait bien, et, afin d’en être sûr, chaque saïs frictionnait les jambes de son poney jusqu’à la dernière minute. Derrière les saïs se tenaient assis tous ceux du régiment des Skidars qui avaient obtenu une permission pour assister au match, la moitié environ des officiers indigènes, et cent ou deux cents hommes à la peau brune, à la barbe noire, sans parler des musiciens du régiment, dont le doigt parcourait nerveusement les grosses cornemuses enrubannées[2]. Les officiers indigènes tenaient des faisceaux de sticks de polo, de longs maillets emmanchés de bambou, et comme, après le tiffin, la grande tribune officielle se remplissait, ils se disposèrent soit isolément, soit deux par deux, en différents points autour du terrain, de façon qu’un stick se trouvât-il brisé, le joueur n’eût pas loin à galoper pour s’en voir remettre un autre. Une fanfare de cavalerie britan-

  1. Déjeuner, dans l’Inde.
  2. Les cornemuses furent très répandues primitivement dans l’Inde elle-même, l’Asie Mineure et la Chine, et se trouvent être l’instrument de musique national de certains régiments indigènes de l’Inde tout aussi bien que celui des Highlanders.(N. D. T.)