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UNE MUSE


Mme LOUISE COLET[1]


Dans la pléiade des femmes auteurs qui, stimulées, dit-on, par la réputation de George Sand, fleurirent en France sous Louis-Philippe et le Second Empire, l’une d’elles, à son essor, dépassa toutes ses sœurs, non en talent, mais en notoriété. Elle n’exagérera que de peu, quand, arrivée au seuil de la vieillesse, elle évoquera son passé en ces termes : « Aucune des grandes voix du siècle ne m’a manqué. Chateaubriand et Béranger m’ont dit les premiers : « Vous êtes poète. » Lamartine n’a pas dédaigné mes chants de jeune fille ; Balzac et Humboldt m’ont applaudie un soir ; Vigny, Alexandre Dumas, Deschamps et Alfred de Musset m’ont serré la main comme celle d’une sœur ; Victor Hugo, de la terre d’exil, me répète sans cesse : « Persévérez. » Fières consolations, qui m’ont empêchée de mourir ! » Nous verrons tout à l’heure qu’à ces différents témoignages il faut ajouter ceux, plus rares, et par suite plus flatteurs, de Flaubert et de Louis Bouilhet. L’Académie française consacrait ces jugements, en décernant à Louise Colet, dans quatre concours successifs, le prix de poésie. Sans doute dirait-on aujourd’hui qu’elle détient le « record » des récompenses académiques.

  1. Conférence prononcée à la Société des Conférences le 14 février 1910.