Page:La Saga de Nial, trad. Dareste, 1896.djvu/125

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
105
la saga de nial

Gunnar, si je puis passer pour un homme moins brave que les autres, parce que j’ai plus de peine qu’un autre à me décider à tuer les gens ».

LV

Voici qu’on apprit la nouvelle, et bien des gens furent d’avis que la chose n’était pas arrivée avant qu’on eût pu s’y attendre.

Gunnar alla à Bergthorsval et dit à Njal la besogne qu’il avait faite. Njal dit : « Tu as beaucoup fait, mais aussi tu avais été poussé à bout ». — « Qu’arrivera-t-il bien maintenant ? » dit Gunnar. « Veux-tu que je te dise, dit Njal, ce qui n’est pas encore arrivé ? Tu vas aller au ting, et si tu suis mes conseils, tu auras de toute cette affaire beaucoup d’honneur. Ceci est le commencement de tes grandes tueries ». — « Donne-moi un bon conseil », dit Gunnar. « C’est ce que je vais faire, dit Njal. N’en tue jamais plus d’un dans une même famille, et ne romps jamais la paix que de bons et vaillants hommes auront faite entre toi et d’autres, et surtout dans cette affaire-ci ». — « J’aurais cru, dit Gunnar, qu’il fallait moins que d’un autre attendre cela de moi ». — « Je veux le croire, dit Njal, mais en cette affaire souviens-toi d’une chose : c’est que si cela arrive, tu trouveras bientôt la mort ; autrement tu deviendras un vieillard ». Gunnar dit : « Sais-tu quelle sera ta mort ? » — « Je le sais » dit Njal. — « Et laquelle ? » dit Gunnar. — « Celle qu’on eût pensé le moins » dit Njal. Après cela Gunnar s’en retourna chez lui.

On envoya un homme à Gissur le blanc et à Geir le Godi ; car c’était à eux à porter plainte pour le meurtre d’Otkel. Ils se réunirent et parlèrent ensemble de ce qu’il y avait à faire. Ils furent d’accord qu’il fallait porter la cause devant la justice. On chercha donc qui voudrait s’en charger ; mais personne n’était disposé à cela. « Il me semble, dit Gissur, que nous avons le choix entre deux partis : ou que l’un de nous deux