Page:La Société nouvelle, année 12, tome 1, 1896.djvu/192

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pas, de vous allier avec eux au point de vous confondre, vous ne leur permettrez jamais de pénétrer dans votre organisation, dans laquelle ils ne pourront jamais vouloir entrer que pour la fausser, que pour la détourner de son but, que pour la paralyser et que pour la dissoudre. Ils n’auraient pas même cette intention, qu’ils travailleraient indirectement dans ce but, tant leur nature est contraire à la vôtre. — Il me paraît donc absolument nécessaire que toutes vos organisations, tant publiques que secrètes, restent tout à fait en dehors de toutes les organisations mazziniennes et bertaniennes.



Et maintenant un mot sur votre organisation romagnole, et en général sur celle des sections de l’Internationale en Italie. Croyez-vous qu’elles pourront résister et survivre, en tant qu’organisations publiques et légales, aux persécutions de votre gouvernement ? — Il n’est plus de doute possible, la persécution contre l’Internationale est universelle, internationale. Après la défaite de la France républicaine et socialiste, il fallait d’ailleurs s’y attendre. L’Allemagne impériale, l’Allemagne de Bismarck, unie tendrement avec le knout tsarien de Russie, se trouve, comme de raison, à la tête de la réaction. Bismarck semble peu faire lui-même, mais il fait faire les autres. Il (dirige)[1] souvent, sans qu’ils le soupçonnent eux-mêmes, la politique intérieure de tous les autres gouvernements ; et il n’est point de doute qu’il n’y ait une entente positive entre tous contre l’Internationale, la plus puissante et on peut même dire l’unique représentante de la révolution en Europe, aujourd’hui. — En France, en Italie, en Belgique, en Allemagne on sévit contre elle. Si les choses marchent quelque temps dans ce sens, la Suisse entrera bientôt dans la même voie. D’abord elle est trop faible pour résister longtemps à la pression impérative des grandes puissances qui l’entourent et qui ne demanderaient pas mieux que de la partager entre elles ; et ensuite il faut dire aussi que la bourgeoisie soi-disant radicale, celle qui gouverne aujourd’hui dans la plus grande partie des cantons de la Suisse, ne demandera pas mieux que de se voir forcée par la pression diplomatique des grandes puissances, à sévit contre l’Internationale. Cette association n’a qu’un seul abri en Europe à cette heure : c’est l’Angleterre. Il faudrait une révolution aristocratique, un renversement de la Constitution pour l’en chasser. Et les associations ouvrières y forment déjà une véritable puissance, au point que les partis politiques, tories, whigs et radi-

  1. Le verbe manque dans le manuscrit, mais le contexte conduit naturellement à l’interprétation adoptée.