Page:La Société nouvelle, année 8, tome 1, 1892.djvu/631

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« Excusez-moi, » dit-il, après un instant ; « je ne ris pas de quoi que se soit vous concernant, mais de la mode ridicule du XIXe siècle, en usage parmi les riches, le soi-disant monde cultivé, qui ignorait tous les états par lesquels leur dîner de tous les jours passait avant de leur arriver, et qui considérait ces choses comme des occupations trop basses pour leur intelligence élevée. Idiots inutiles ! Allons donc, je suis un homme de lettres, comme nous, animaux bizarres, nous étions nommés, et cependant je suis un très bon cuisinier moi-même. »


— « Je le suis également. »


— « Bien, alors, je pense que vous me comprenez mieux que vous ne paraissez le faire, en jugeant d’après vos paroles et votre silence. ».


— « Peut-être est-ce ainsi ; mais les gens mettant en pratique ordinairement ce sens d’intérêt dans les vulgaires occupations de la vie, m’effraient. Je vous poserai tantôt une ou deux questions concernant ce sujet. Mais il faut que je vous demande encore quelle est la position des femmes parmi vous. Vous avez étudié le mouvement de l’émancipation de la femme au XIXe siècle : ne vous rappelez-vous pas que quelques-unes de ces femmes supérieures désiraient émanciper la partie la plus intelligente de leur sexe de l’obligation… d’avoir des enfants ? »


Le vieillard devint sérieux de nouveau. Il dit : « Je me souviens, en effet, de quelque chose au sujet de cet étrange cas de folie sans base, résultat, comme toutes les folies de cette période, de cette hideuse tyrannie de classe qui existait alors. Ce que nous en pensons maintenant, vous vouliez dire ? Mon ami, c’est une question à laquelle il est aisé de répondre. Comment serait-il possible qu’il en fût autrement, sinon que la maternité soit hautement honorée parmi nous ? C’est une chose qui va sans dire, que les douleurs naturelles et nécessaires par lesquelles la mère doit passer forment un lien d’union entre l’homme et la femme, un stimulant parti culier d’amour et d’affection entre eux, et que ceci est universellement reconnu. Pour le reste, rappelez-vous que tous les fardeaux artificiels de la maternité sont maintenant supprimés. Une mère n’a plus ces misérables anxiétés pour l’avenir de ses enfants. Ils peuvent en vérité devenir meilleurs ou pires ; ils peuvent trahir vos plus chères espérances ; des inquiétudes semblables sont une partie des joies et des peines qui composent la vie de l’homme. Mais au moins la crainte lui est épargnée (c’etait considéré comme certitude, jadis,) que l’incapacité artificielle pouvait faire de ces enfants quelque chose de moins que des hommes et des femmes. Une mère sait que la vie et les actes de ses enfants seront en harmonie avec leurs facultés. Dans les temps passés, il est évident que « la société » d’alors venait en aide au dieu judaïque, et à l’homme de science de cette époque en chargeant