gnez-moi le tourmenteur ; faites venir le bourreau, et me laissez mourir avec le renom du plus féal chevalier d’Auvergne.
— Vous n’en êtes point encore là, Louis ; mais je voudrais en vain vous épargner le tourmenteur ; vous seul le pouvez, en nommant sur l’heure ce qui est à votre escient.
— Je savais bien, Prévôt, que vous aviez oublié quel je suis, Si je redoute la question, est-ce donc crainte de souffrir ?
Est-ce pas plutôt crainte de parler, de taxer à faux des innocents ? Allez, en fait de souffrance, je ne redoute plus rien, depuis que j’ai été aux mains des Bourguignons ; c’est peut-être le seul avantage que j’aie retiré de votre alliance,
— Encore une fois, Messire, persistez-vous à vous taire ?
— Je persiste à n’être point félon.
— Qu’on emmène le chevalier !…
Bosrédon était à peine réintégré dans sa prison, que les verroux en furent tirés de nouveau. Le greffier parut à la porte entr’ouverte. Il venait signifier à l’accusé le jugement qui le condamnait à la question.
Dans une chambre où nulle ouverture n’avait été pratiquée pour laisser pénétrer le jour, un large brasier était allumé : sa lueur, répandue sur les murailles verdâtres, en attestait l’humidité, et n’en montrait que trop l’ameublement funeste. En face, un luxe effrayant de tenailles, de maillets, de cordes, de scies ; et au-dessous, un lit et des chevalets. À gauche, un cordon de lourds anneaux fortement scellés à trois pieds du sol ; et à douze pieds de distance, un cordon parallèle, semant les dalles du pavé. À droite, un banc étroit, sur lequel se pressaient déjà deux examinateurs et deux conseillers ; enfin la table qui attendait le greffier. Celui-ci entra, pendant que deux sergents suspendaient à chaque angle de la salle un flambeau de résine ; il précédait Bosrédon. Les deux sergents, dont l’un était le tourmenteur du Châtelet, l’autre son aide-juré, allèrent le recevoir des mains du guichetier. Une dernière sommation fut adressée à l’accusé ; il y répondit par un nouveau re-
