Page:La Variété, revue littéraire, 1840-1841.djvu/365

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 329 —

le plus remarquable, il se pencha sur la loge, prêt à s’élancer à l’orchestre, en s’écriant d’une voix terrible :

— C’est infâme, ce qu’ils font ! Qu’ils prennent ma vie, les misérables…

Toute l’assemblée se retourna. Logroscino, effrayé, le prit avec force, et dit :

— Finiras-tu tes folies, et laisseras-tu achever ce chef-d’œuvre ?

L’orphelin, comme un enfant qui craint le maître, se jeta au fond de la loge, et ferma les yeux : il était la proie d’un cauchemar.

Enfin arriva le moment suprême, le moment où tout est dit, où l’on appelle l’auteur pour le honnir ou pour l’exalter. De toutes parts retentirent ces mots :

— L’auteur ! l’auteur !

Personne ne répondit.

— L’auteur ! l’auteur ! cria-t-on avec force. Une voix surhumaine se fit entendre, et dit :

— Giovanni Pergolèse !

C’était Logroscino.

Ninetta et son fils tombèrent sans connaissance. Les bravos se faisaient entendre ; dans toute la salle on disait : — Giovanni Pergolèse !

Il est vrai que la pièce qui venait d’être représentée était la Serva Padronna, que Luggi avait enlevée sur le clavecin de l’enfant adoptif de Ludovic.

Charles BÉNÉZIT.