Page:La Vie littéraire, I.djvu/153

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qu’il avait voulu s’accomplirait et qu’il serait vengé.

Il laissait, d’ailleurs, auprès de Marfa un être extraordinaire, capable de seconder inconsciemment son action suggestive. C’était un pope, de la secte des Silipovetz, « volontaires expiateurs des crimes de la terre, disciples toujours sanglants de l’agneau égorgé » (p. 65), qui enseignent que Jésus, en voulant mourir sur la croix, donna l’exemple salutaire du suicide. Celui-là, nommé Popof, suivait partout la jeune princesse Volkine, qui le considérait comme un saint. Il allait, sa robe de pope en haillons, rampant dans la poussière et se meurtrissant le visage aux cailloux des routes.

La suggestion imposée par le vieux Volkine eut son effet, sous les yeux de M. Stéphane Cheraval, le jour même que Lucien et Marfa avaient fixé pour leurs noces. Lucien alla chercher le juge d’instruction du ressort, le pria d’être son témoin, le mena devant un autel de fleurs élevé la veille par le prêtre de l’expiation et de la mort volontaire, et, là, il fit, sous l’empire de l’hypnose, l’aveu de son crime. Quand il eut achevé, Popof donna, avec une joie religieuse, du poison à Lucien et à Marfa, pour qui Lucien avait péché. Sûr alors de leur félicité, il songea à son propre salut et se pendit. Le palimpseste disparut dans cette catastrophe.

Je n’ai pas analysé la nouvelle de M. Gilbert-Augustin Thierry, j’en ai seulement indiqué la donnée sans faire pressentir suffisamment la solidité avec