Page:La Vie littéraire, I.djvu/253

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attablés quand on nous a dit qu’ « un attendrissement noyait leurs faces » ? M. Zola n’a guère mis dans ce nouveau livre que ses défauts. Le plus singulier est l’effet de cet œil de mouche, de cet œil à facettes qui lui fait voir les objets multipliés comme à travers une topaze taillée. C’est ainsi qu’il termine la description, assez exacte et assez vive d’ailleurs, d’un marché dans un chef-lieu de canton, par ce trait inconcevable : « De grands barbets jaunes se sauvaient en hurlant, une patte écrasée. » C’est ainsi qu’une hallucination lui fait voir des myriades de semeurs à la fois. « Ils se multipliaient, dit il, pullulaient comme de noires fourmis laborieuses, mises en l’air par quelques gros travail, s’acharnant sur une besogne démesurée, géante à côté de leur petitesse ; et l’on distinguait pourtant, même chez les plus lointains, le geste obstiné, toujours le même, cet entêtement d’insectes en lutte avec l’immensité du sol, victorieux à la fin de l’étendue et de la vie. »

M. Zola ne nous montre pas distinctement les paysans. Ce qui est plus grave encore, c’est qu’il ne les fait pas bien parler. Il leur prête la loquacité violente des ouvriers des villes.

Les paysans parlent peu ; ils sont volontiers sentencieux et expriment souvent des idées très générales. Ceux des régions où l’on ne parle pas patois ont pourtant des mots savoureux qui gardent le goût de la terre. Rien de cela dans les propos que M. Zola met dans leur bouche.