Page:La Vie littéraire, II.djvu/227

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

avec un beau génie. Ceux-là, dès le berceau, sont nos maîtres, et la critique, loin de leur rien apprendre, doit tout apprendre d’eux.

» Vous me demandez, monsieur, « si je vois un bon ou un mauvais signe en cette maîtrise de tous les arts, y compris celui d’écrire, par la critique » . J’ai déjà dit quelques mots sur l’excellence de la critique au sujet d’un livre de M. Jules Lemaître. Je crois que la critique ou plutôt l’essai littéraire, est une forme exquise de l’histoire. Je dis plus : elle est la vraie histoire, celle de l’esprit humain. Elle exige, pour être bien traitée, des facultés rares et une culture savante. Elle suppose un affinement intellectuel que de longs siècles d’art ont pu seuls produire. C’est pourquoi elle ne se montre que dans les sociétés déjà vieilles, à l’heure exquise des premiers déclins. Elle survivra à toutes les autres formes de l’art si, comme dit une scolie de Virgile que j’ai trouvée quelque part citée par M. Littré, « on se lasse de tout, excepté de comprendre » . Mais je crois plutôt que les hommes ne se lasseront jamais d’aimer et qu’il leur faudra toujours des poètes pour leur donner des sérénades.

» — Où en est l’avenir ? demandez-vous, monsieur, en terminant votre lettre.

» L’avenir est dans le présent, il est dans le passé. C’est nous qui le faisons ; s’il est mauvais, ce sera de notre faute. Mais je n’en désespère pas.

» Je m’aperçois que je n’ai pas dit la centième partie de ce que je voulais dire. Je voulais, par exemple,