Page:La Vie littéraire, II.djvu/373

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parce que ses chansons faisaient aimer la France. Il ne voudrait jamais quitter les deux flèches de Sainte-Croix, ni sa petite ville noire, boiteuse, bossue, bâtie de travers, mais entourée d’herbe tendre et d’eau pure, baignée d’un ciel doux et qui, comme toutes les villes normandes, est une jolie laide. Il ne vient à Paris qu’à grand regret et pour l’éducation de ses enfants. Mais dans le nouveau logis, une main délicate et fidèle a pieusement transporté tous les souvenirs de famille et de jeunesse ; pas un lien n’est rompu, pas un fil brisé : le passé chéri est encore là tout entier. Suivrai-je le romancier poète dans sa retraite de Versailles, où il se reposait par le travail des travaux de la vie ? C’est là qu’il a été atteint, il y a moins d’un an, par un deuil cruel, que deux existences porteront toujours. Le jour où M. Octave Feuillet a perdu un fils, il a pu savoir combien il était universellement aimé : les témoignages de sympathie et de respect affluaient de toutes parts dans sa maison. J’espère qu’il ne lira pas ce que j’écris ici dans la sincérité de mon cœur. On ne doit rouvrir les plaies que pour les panser, et mes paroles émues n’ont point, hélas ! la vertu d’un baume ou d’un électuaire.

C’étaient là les pensées qu’au sortir de Saint-Étienne-du-Mont, sur la place du Panthéon, battue du vent et de la pluie, je roulais dans ma tête, et, me rappelant la belle inscription latine que je venais de lire, j’appliquais à l’auteur de Julia de Trécœur ce que Boileau disait de la mémoire de son illustre ami. Si digne d’éloges, si heureuse,