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LA SÉPARATION DES ÉGLISES ET DE L’ÉTAT


s’adresse à nouveau à Pépin. Il fait le voyage de Paris et conclut bientôt avec le prince des Francs une alliance décisive, qui ouvre définitivement l’ère de la puissance romaine, en même temps qu’elle contribue à établir en France la domination de la dynastie carlovingienne.

Cette domination fut surtout assurée par une cérémonie qui empruntait aux croyances religieuses du temps une portée immense. Pépin venait d’être élevé au trône de France. Suivant la coutume, il y avait eu élection. Mais, au moment où avec ses deux fils, il allait entreprendre une guerre contre les Lombards, le pape lui donna l’onction sainte, ainsi qu’à ses deux fils.

Dans l’Histoire générale, de Lavisse et Rambaud, l’importance essentielle de cette intervention papale est marquée en quelques phrases décisives : « Le sacre était une nouveauté chez les Francs. Aucun des Mérovingiens, pas même Clovis, ne l’avait reçu. Cette cérémonie mystique élevait le roi au-dessus du peuple, d’où il était sorti. Les Francs avaient élu Pépin, mais, le jour du sacre, le pape leur a interdit à jamais de se servir de leur droit d’élection ; ni eux, ni leur descendance ne pourront prendre un roi dans une autre race, celui-ci ayant été élu par la divine Providence pour protéger le siège apostolique. Désormais les « reins » du roi et de ses fils sont sacrés. Dieu y a mis le pouvoir d’engendrer une race de prince que les hommes, jusqu’à la fin des temps, ne pourront renier sans être reniés par le Seigneur. Autrefois les guerriers portaient leur chef sur le bouclier au bruit des armes et des acclamations ; à Saint-Denis, ce n’est pas un homme, c’est une dynastie qui a été élue au chant des cantiques. Le Seigneur a repris aux hommes le pouvoir de faire des rois. C’est Lui qui « les choisit dès le sein de leur mère ». La raison de régner, la source de l’autorité royale sera désormais la grâce de Dieu. »