Page:Labiche - Théâtre complet, Calman-Lévy, 1898, volume 02.djvu/233

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BLANDINET.

Eh bien, essaye-le !

FRANÇOIS.

Il fallait lui acheter une livre de pain, à ton petit ami.. et tu aurais vu !…

BLANDINET.

Quoi ?

FRANÇOIS.

Il t’aurait envoyé promener… je la connais, celle-là !

BLANDINET.

Oh ! tu les connais toutes, toi !… Il a tout dit quand il a dit ça !… Qu’un ami… un vieil ami de quarante ans, vienne vous confier ses embarras… ses chagrins… au lieu de lui tendre la main, de le sauver… on lui répond : « Je la connais, celle-là !… » Un malheureux vous accoste dans la rue… « Je la connais, celle-là !… » Enfin, on n’a qu’un enfant… un fils… on le lance sans ressources sur le pavé de Paris… et quand le pauvre petit diable, humilié, râpé, affamé peut-être… obéissant à son instinct d’enfant… se tourne vers son père… on lui écrit : « Je la connais, celle-là !… » et, on porte vingt centimes à son compte !… Ce n’est pas cher… mais c’est vilain ! c’est laid !… et tu me ferais croire à la fin que tu n’es qu’un…

FRANÇOIS.

Un quoi ? va donc !

BLANDINET.

Non !… je ne veux pas le dire… parce que ça te ferait de la peine !…

FRANÇOIS.

As-tu fini ?

BLANDINET.

Oui.