Page:Labiche - Théâtre complet, Calman-Lévy, 1898, volume 04.djvu/298

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(Pendant ce qui suit, il ouvre son paquet, y prend une veste qu’il passe.) Je crois que je serai très bien ici… la maison paraît calée… En entrant, j’ai vu quatorze paires de bottes sur une planche… Règle générale : toutes les fois qu’on voit quatorze paires de bottes sur une planche, on peut dire : "Voilà une maison calée !…" Moi, j’aime les gens riches !… d’abord, parce qu’ils sont riches… ensuite… parce qu’ils ont de l’argent !… Allons, c’est décidé… je me fixe ici, j’y fais mon trou… Ah ! la bourgeoise m’a dit de mettre le couvert… Où sont les assiettes ? ah ! dans l’armoire… (Il prend une assiette, et tout en l’essuyant.) Qu’est-ce que je demande, moi ? qu’on me nourrisse bien… qu’on me paye bien… qu’on me laisse prendre du ventre tranquillement… voilà pour le temporel… Quant au spirituel, je suis exempt de passions… je n’aime ni le jeu, ni le vin, ni… ah ! il y a les femmes !… hé ! hé !… Eh bien, non ! je n’ai jamais été bien cavalcadour sur cet article-là !… Et pourtant, chez M. Véry, j’étais aux premières loges pour me brûler le sang !… Quand on a servi le 6 et le 7 !… bigre de bigre ! il y faisait chaud, dans le 6 et le7 !… Après ça, moi, je ne regardais personne… je m’occupais de ma petite affaire… mes assiettes, mes couteaux, mes fourchettes… c’est au point que j’aurais pu servir ma propre femme sans la reconnaître… si toutefois j’avais eu une femme propre… qui me soit propre !… Mais, pour le quart d’heure, ce n’est pas là ce que je cherche… (Mélancoliquement.) Oh ! non, ma vie a un autre but !… je cherche mon père… Pauvre Antony !

Air de la romance de Joseph

Si dans ce monde j’ai ma place,
Je ne sais par qui ne comment.
J’y vins comme à travers l’espace
Vient la flèche du Mohican.
J’ai beau chercher, je perds courage,
Mon auteur me reste caché !