Page:Labiche - Théâtre complet, Calman-Lévy, 1898, volume 10.djvu/166

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peut-être… Je courais un peu les femmes… les femmes mariées surtout… comme vous, peut-être.

Monnerville, froidement.

Veuillez continuer.

Verdinet, à part.

Il ne rit pas ! (Haut.) J’avais imaginé une ruse charmante… que je vais vous donner… vous pourrez en faire votre profit contre les maris… (Riant.) Ah ! ah ! les maris !

Monnerville, froidement.

Après ?

Verdinet, à part.

Il n’est pas gai !… c’est un gandin… triste !… (Haut.) Je me faisais passer pour un mari trompé… cela inspirait de la confiance ; on s’intéressait à moi, on me plaignait… on me consolait… et vous savez… de la pitié à l’amour, il n’y a qu’un pas… (S’efforçant de rire.) Un tout petit pas.

Monnerville, sérieusement.

Pardon, monsieur… mais je ne vois pas ce que mon nom avait à faire dans tout cela.

Verdinet.

Voilà… Pour que ma femme fût séduite… il me fallait un séducteur… Alors, j’ai pris un nom en l’air, un nom de station…, Monnerville… ligne d’Orléans… quatre kilomètres d’Etampes… Je me disais : "Cela n’existe pas…" Vous voyez, c’est bien simple ! bien innocent… Touchez là, monsieur !

Il lui tend la main.

Monnerville, froidement.

Je n’ai pas à apprécier, monsieur, le plus ou moins de bon goût de vos ruses galantes… mais il n’en résulte pas moins que M. Ernest de Monnerville a reçu un soufflet et a refusé de se battre.