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son autorité ; on ne peut leur conférer une autorité spirituelle, car la conscience appartient à l’individu et non point à l’État ; le magistrat civil ne peut pas même intervenir pour préserver une église de l’apostasie ou de l’hérésie ; son pouvoir ne s’étend qu’aux corps, aux biens, aux actes extérieurs des individus.

« Écarter des âmes ce joug qui les opprime, ajoutait-il avec une assurance prophétique, que l’avenir n’a pas démentie, c’est non-seulement faire un acte de justice et de charité, c’est encore développer une force puissante, c’est engager tous les intérêts, toutes les consciences à conserver la paix et la liberté communes[1]. »

Les idées de Roger Williams sont aujourd’hui le patrimoine de l’Amérique, et c’est là sa gloire, mais à l’époque où il vivait, les puritains infatués de leur doctrine, ne virent dans le nouvel apôtre qu’un homme d’un esprit mal assis et dangereux, car sa doctrine allait à substituer le suffrage universel au gouvernement de l’Eglise privilégiée. Roger, proscrit et menacé, s’enfuit chez les Indiens Narragansets ; il fut accueilli comme un fils par les deux Sachems Miantonomy et Canonicus. Pour eux ce n’était pas un visiteur ordinaire, car, dès son arrivée en Amérique, Roger s’était montré leur défenseur et leur ami ; il avait

  1. Bancroft, I, 371.