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aussi la sécurité dont jouit la colonie prouve-t-elle que cet esprit de douceur et d’égalité avait gagné ces natures sauvages. Cet esprit, du reste, était bien celui des quakers, de ces hommes qui devançaient leur âge par leur horreur de la guerre, et leur amour sincère de l’humanité.

« Nous avons fait mieux, » écrivait l’un d’eux à cette occasion, « que si avec les fiers Espagnols nous avions gagné les mines du Potose. Nous ferions rougir de leurs honteuses victoires ces héros ambitieux que le monde admire. À ces pauvres âmes sans lumière qui nous entourent, nous apprenons leurs droits comme hommes[1]. »

Penn s’occupa avec ardeur de la constitution qu’il donnerait à la colonie, des principes sur lesquels il appuierait son gouvernement. Il avait sur ce sujet des idées fort avancées. Pour lui, sans s’inquiéter outre mesure des formes politiques, tout gouvernement était libre où la loi régnait et où le peuple prenait part à la loi. Hors ces deux conditions, tout était tyrannie, oligarchie ou confusion. En ce point son amour des hommes s’accordait avec la fierté républicaine de son ami Algernon Sidney, véritable Romain des beaux jours de la république. Chez l’un c’était l’admiration de l’antiquité, chez l’autre c’était la religion qui menait droit aux formes démocratiques, le triomphe

  1. Bancroft, II, 383.