Page:Laboulaye - Histoire politique des États-Unis, tome 1.djvu/519

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Pascal s’indignait qu’une montagne changeât les idées de justice : vérité au deçà des Pyrénées, disait-il, erreur au delà ; vous voyez qu’un bras de mer ébranle les principes politiques que nous croyons les plus sûrs.

D’où vient cela ? interrogeons l’histoire, elle nous donnera le mot de cette énigme.

Quand Hugues Capet se fit couronner, c’était le seigneur d’un grand fief, mais le reste de la France appartenait à une foule de barons libres, indépendants, toujours en guerre ou en pillage. Il fallait une force supérieure pour imposer silence à ces passions brutales, pour arrêter le morcellement de la société et du pouvoir ; cette force fut la monarchie. Aussi, dès le premier jour, dans les villes comme dans les campagnes, y eut-il union du peuple et du roi pour débarrasser le pays de cette noblesse qui l’opprimait. À l’aide du droit romain, des légistes et des parlements, la royauté abattit l’aristocratie, et nous conduisit à l’égalité par le chemin du despotisme. C’est ainsi que la monarchie a été populaire en France, tandis que la féodalité y est restée odieuse, car nous en avons surtout connu les abus, sans compter qu’elle a été calomniée comme tous les partis vaincus.

L’Angleterre n’a jamais formé qu’un seul fief. Dès le jour de la conquête le roi a été tout-puissant, sans rivaux, le supérieur hiérarchique avoué de tous. C’est lui qui a pesé sur le peuple