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fants n’y ont d’autre droit que celui que je leur accorde. Tel est le testament de la loi anglaise et de la loi américaine : c’est le triomphe de la volonté individuelle, c’est la liberté absolue.

Comment en Angleterre, dans un pays où la perpétuité des familles est dans le vœu de la loi, a-t-on laissé une liberté si grande au propriétaire (au moins pour les biens non substitués) ; comment, au contraire, en Amérique, laisse-t-on au père de famille un arbitraire aussi grand, au lieu de faire par avance la part de l’égalité, et de maintenir les droits naturels de la famille, comme fait notre législation ? Car enfin, le testament est une institution aristocratique ou démocratique, et s’il est bon dans un pays, il est nécessairement mauvais dans l’autre ?

Cet argument est plus spécieux que réel ; c’est l’erreur de ceux qui pensent que la loi agit indépendamment de l’esprit du peuple qui s’en sert. Les mœurs, au contraire, ont une telle influence, que la même loi dans les deux pays donne des résultats tout différents.

En Angleterre, où l’ambition du négociant devenu riche est de placer sa famille au sein de l’aristocratie, où le premier devoir du noble est de maintenir la splendeur de sa maison, la liberté de tester est des plus favorables au génie aristocratique ; et, notez-le bien, il en fut de même à Rome où cette liberté fut longtemps absolue.