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pour la réforme que le ministre essaye aujourd’hui avec une fermeté digne du succès.


§ 4. — De la liberté du professorat (Lehrfreyheit).


Pour que l’enseignement fût établi sur un principe solide et que puissent avouer la science et la raison, il ne suffirait pas d’accorder à l’élève le droit d’étudier dans l’ordre qui lui plairait le mieux, ni de concéder au professeur le libre choix de ses méthodes ; il faut encore qu’on trouve dans la Faculté, à côté des cours exigés pour l’examen final, l’enseignement de toute matière qui offre un intérêt théorique ou pratique ; autrement, en effet, la liberté d’études n’est qu’un vain leurre, et nous retombons dans les inconvénients de la science officielle. Il faut, en outre, que chacun de ces objets d’études soit enseigné par plusieurs maitres, afin que l’élève puisse choisir entre diverses méthodes celle qui convient le mieux à la nature de son esprit car, évidemment, s’il n’y a qu’un professeur pour chaque discipline, la liberté n’est pas complète et d’ailleurs, rien n’est plus antipathique à la vérité que le monopole.

Quant au professeur, il lui faut une liberté non moins grande. Ce n’est point assez de le laisser maître de ses méthodes, si, enfermé dans une seule chaire, il lui est interdit de sortir de cet étroit domaine : le forcer à faire, pendant toute sa vie, un seul et même cours, c’est le condamner à l’immobilité ; c’est vouloir qu’au bout de vingt ans il prenne cet enseignement borné pour la science tout entière, et, par exemple, qu’il ne connaisse à la jurisprudence d’autre sphère que le Code civil.

Enfin, l’intérêt même de la science exige impérieusement la liberté du professorat. Dans un pays bien organisé, c’est par te professeur que le progrès doit se faire ; c’est par lui et non par le gouvernement doit être introduite dans la Faculté toute doctrine nouvelle qui a acquis un degré de développement suffisant. Le ministre, quelque éclairé qu’on le suppose, ne peut pas