Page:Lafargue - Le Droit à la paresse.djvu/26

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cement du siècle est le plus terrible fléau qui jamais ait frappé l’humanité, que le travail ne deviendra un condiment des plaisirs de la paresse, un exercice bienfaisant à l’organisme humain, une passion utile à l’organisme social que lorsqu’il sera sagement réglementé et limité à un maximum de trois heures par jour, est une tâche ardue au-dessus de mes forces ; seuls des physiologistes, des hygiénistes, des économistes communistes pourraient l’entreprendre. Dans les pages qui vont suivre, je me bornerai à démontrer qu’étant donné les moyens de production modernes et leur puissance reproductive illimitée, il faut mater la passion extravagante des ouvriers pour le travail et les obliger à consommer les marchandises qu’ils produisent.


III


Un poète grec, du temps de Cicéron, Antiparos, chantait ainsi l’invention du moulin à eau (pour la mouture du grain) qui allait émanciper les femmes esclaves et ramener l’âge d’or : « Épargnez le bras qui fait tourner la meule, ô meunières, et dormez paisiblement ! Que le coq vous avertisse en vain qu’il fait jour ! Dao a imposé aux nymphes le travail des esclaves et les voilà qui sautillent allègrement sur la roue et voilà que l’essieu ébranlé roule avec ses raies, faisant tourner la pesante pierre roulante. Vivons de la vie de nos pères et oisifs réjouissons-nous des dons que la déesse accorde. » — Hélas ! les loisirs que le poète païen annonçait ne sont pas venus ; la passion aveugle,