Page:Laforgue - Moralités légendaires.djvu/68

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui le croyaient comme elle (erreur ! erreur !) ; — moi, je regardais le jet d’eau jaillir et monter damnablement vers l’étoile de Vénus qui se levait à l’horizon, tandis que, éveillant les échos de la vallée, montaient aussi des fusées, des fusées telles que d’autres jets d’eau encore, mais plus congénères des étoiles, — des étoiles aussi indubitables et chimériques à ce jet d’eau et à ces fusées, d’ailleurs, qu’à la marche d’Aïda fulminée nostalgiquement par ce roseau pensant de cornet à piston. C’était ineffable comme tout, ces soirées-là. Vous qui y étiez et n’y aviez pas attiré votre fiancée inconnue, comme l’aimant attire la foudre, ne cherchez plus, car celle que vous trouveriez désormais ne serait qu’une autre, une pauvre autre.

Ô petite ville, vous avez été mes seules amours, mais en voilà assez. Depuis qu’elle (Elle) est décédée, je n’y reviens guère, je ne m’y frotte guère ; ce n’est pas sentimentalité (bien que la sentimentalité ne soit pas ce qu’un vain peuple pense), mais un je ne sais quoi qui n’a de nom dans aucune langue, de même que la voix du sang.