Page:Laforgue - Moralités légendaires.djvu/81

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civière à idole plastique, de vagues reliques de clocher.

En blanc encore, une théorie recueillie de communiantes voilées à longs plis, les yeux baissés, les mains jointes en pointe, murmurant d’un commun accord des choses apprises par cœur. (Ah ! quand le cœur y est...)

Alors s’avançait, solide, précédé du corps des pompiers, l’orphéon, un orphéon de paysans boucanés, en redingotes et gibus ; cuivres bosselés dans des retours de bals de noces, clarinettes de Jocrisse à la foire, et futaille de la grosse caisse dont la peau portait des bleus, le carton de musique, fiché, sale de manipulé, à l’instrument même. Ils équarrissaient en ce moment la marche nuptiale du Songe d’une Nuit d’Été de Mendelssohn.

Encore quatre fillettes choisies, avec leurs corbeilles pleines de pétales de roses à semer, et c’était enfin, ses quatre hampes tenues par des gens de poids, le dais rose à franges d’or abritant l’ecclésiastique officiant, lequel, pompeux au dehors mais en lui-même anéanti, offrit à ces fidèles de grand chemin le soleil légendaire du Très-Saint-Sacrement.

Et le dais fit halte devant le reposoir de l’hôtel de France !

Ô pas étouffés d’édifiante onction, silence en plein jour au soleil, sonnette tintant grêle et sacrée comme à la messe au moment de l’élévation, coups d’encensoir ! Ce Saint-Sacrement était évidemment le clou de la procession.

Les messieurs s’étaient découverts, nombre de dames s’agenouillaient au bord du trottoir. Nul élégant sceptique ne prit la parole.

Ô silence en plein jour au soleil, sonnette tintant grêle et