Page:Lagerlöf - Le Merveilleux Voyage de Nils Holgersson à travers la Suède, trad. Hammar, 1912.djvu/351

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leurs frères et sœurs moururent les uns après les autres. Ils n’avaient eu que quatre frères et sœurs et il n’avait pu y avoir que quatre enterrements, mais aux enfants qui restaient ils avaient paru plus nombreux. Il s’était fait un silence morne dans la cabane.

La mère ne s’était pas laissée abattre, mais le père fut très changé. Il ne plaisantait ni ne travaillait plus. Du matin au soir, il restait la tête dans les mains à réfléchir.

Une fois — c’était après le troisième enterrement — il avait éclaté en paroles égarées, qui avaient effrayé les enfants. Il ne comprenait pas, disait-il, pourquoi ces malheurs les frappaient. N’avaient-ils pas fait une bonne action en recueillant la malade ? Le mal était-il plus puissant que le bien ? Comment Dieu avait-il pu admettre qu’une femme méchante causât tant de malheurs ? La mère avait essayé de le calmer, mais il ne l’écoutait pas.

Deux jours après les enfants perdirent leur père. Il n’était pas mort, il partit, abandonnant tout. Ce fut lorsque la sœur aînée des enfants fut à son tour tombée malade. Le père l’avait aimée plus que tous les autres ; en la voyant mourir, il avait perdu la tête et s’était sauvé. La mère ne se plaignit pas de cet abandon, elle avait eu peur de le voir devenir fou.

Après le départ du père, ils étaient devenus très pauvres. Au début, il leur avait envoyé de l’argent, mais les envois cessèrent vite. Et le jour même où l’on enterra la sœur aînée, la mère avait fermé la maison et était partie avec les deux enfants qui lui restaient. Elle s’était rendue en Scanie pour travailler aux champs de betteraves, et avait trouvé à se placer à la raffinerie de Jordberga. C’était une