Page:Lallier - Allie, 1936.djvu/37

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
– 36 –

gissantes et venant se briser avec fracas sur la falaise, tantôt se faisant plus caressantes et allant mourir en douceur sur la plage.

Je m’endormis sous cette douce impression qu’au moins la nature avait conservé ses droits. Qui sait ? C’était peut-être moi qui étais changé ! Vingt ans de nostalgie avaient peut-être faussé chez moi le sens des réalités. À force de comparer, j’en étais probablement venu à idéaliser mon pays d’origine au détriment de mon pays d’adoption. D’ailleurs, à quoi m’aurait servi une nuit d’insomnie passée à méditer sur un passé déjà lointain, et à me lamenter sur un présent qui, demain, serait déjà dans le domaine du passé ?


IV


J’avais laissé levés les stores de ma fenêtre, afin de pouvoir jouir des premiers rayons du soleil levant. Le propriétaire de la Bastille ne m’avait-il pas dit que le soleil se levait dans ma fenêtre ?

Je ne devais pas regretter cette précaution. En effet, à peine le soleil eut-il dépassé, dans un demi-cercle lumineux, la crête des montagnes qui semblent protéger la vallée du Saint-Laurent de leurs forts et contreforts, que ses rayons diaphanes inondèrent ma chambre, apportant